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J’ai une question pour toi.

Je ne sais pas si tu connais cette chanson des Bérurier Noir, un groupe phare de la scène alternative rebelle des années 80, qui m’a accompagné pendant mon adolescence.

Je suis l’enfant naturel
D’un couple maudit
Je suis l’enfant écorché
D’une trop sale réalité

Jusqu’à quand resterons-nous des « fils de… » ?

Moi, je suis Namir, fils de Siham et de Waguih. Enfin, je l’étais. Siham, ma mère est morte en 2015.Et Waguih en vieillissant, s’éloigne de plus en plus de l’image du père que j’ai connu, enfant. Alors, suis je encore le fils de mes parents

Et si ouin jusqu’à quand le resterai-je ?

Qu’est ce que ça veut dire être enfant ?

 

 

Des fois je me demande ce que j’aurais pensé de mes parents, si je les avais rencontrés, et qu’ils n’avaient pas été mes parents. Quel regard est ce que j’aurais si je pouvais juste les percevoir comme deux humains, indépendamment des liens que j’ai eu avec eu ?

Et je dois bien reconnaitre, que je n’ai ni la distance ni le discernement pour être capable de le faire.

Ma mère est morte il y a 7 ans. Et même si j’ai le sentiment d’avoir fait mon deuil, c’est à dire d’avoir accepté sa perte, je ressens toujours des moments de manque. Celui de ne plus pouvoir discuter, échanger, et rire avec elle. Elle, que j’ai aimé si fort, elle, avec qui parfois je me suis aussi fâché très fort. Et que j’ai peut-être tellement idéalisée, qu’il ne m’est pas possible de la voir pour ce qu’elle était vraiment : une femme imparfaite, comme tous les humains, et qui s’est retrouvée mère sans en avoir forcément ni le désir, ni le mode d’emploi.

L’idéalisation est peut-être le paravent du déni pour les enfants meurtris.

Récemment, le sujet de ma relation à ma mère s’est invite dans ma thérapie. J’ai cru ne pas avoir grand chose a en dire, hormis l’amour que j’ai eu pour elle, et les liens très forts que nous avons tissé ensemble, et qui se sont beaucoup renforcés pendant les dernières années de sa maladie

Peu à peu, les mots, les anecdotes, les souvenirs ont émergé, et j’avais beau raconter ces épisodes de notre vie commune avec humour et nostalgie, j’étais de plus en plus gêné par le silence de mon thérapeute.

– Donc Namir, vous me racontez que vous étiez un enfant non desiré, que votre mere était intrusive, qu’elle ne vous respectait pas, tenait envers vous des propos violents et degradants, qu’elle se fichait de votre consentement, et que vous ne vous sentiez pas entendu, ni protégé par elle quand votre père se comportait violemment avec vous. C’est bien ça ?

– Vous exagérez là, je n’ai pas dit ça !

– Je n’ai fait que reformuler exactement vos mots, Namir. Je n’ai rien rajouté.

Après un moment de surprise, et constatant avec stupeur, que j’étais face à mon propre miroir, je n’ai pu m’empêcher de lui répondre avec humour :

– Ah, bah c’est sympa ! vous êtes sacrément vicieux vous comme thérapeute de me balancer des trucs pareils

– Je comprends votre réaction. Et vous avez raison parfaitement raison de ressentir que je suis vicieux…

– Je plaisantais…

– Quand bien même… je veux dire que c’est normal que vous trouviez mes propos vicieux , et c’est même très sain en fait. Vous êtes en train de réaliser a quel point, ce que vous abordez avec une certaine distance ironique, lorsque je vous le renvoie en direct, peut être perçu comme vicieux. Ce n’est pas moi que vous trouvez vicieux Namir, mais la violence de ce que vous avez subi pendant toutes ces années, et que vous êtes en train d’entendre pour la première fois. Si je vous renvoie tout ça, c’est pour vous aider à prendre conscience de ce que vous avez vécu… Mon intention n’est pas de vous faire souffrir. Je veux juste protéger cet enfant que vous avez été…. Ce que vous me racontez, ça me…. J’arrive même pas encore à le digérer…

 

Alors, oui… un jour viendra, où nous ne serons plus les enfants de nos parents. Ce jour où nous cesserons de les protéger nos parents, en leur trouvant des excuses et des circonstances atténuantes, parce qu’il nous est tout simplement inadmissible de mettre des mots sur des comportements que nous ne voulons pas admettre, parce qu’inappropriés, malsains, violents, pervers, ou juste incompatibles avec le désir d’amour le plus légitime que les enfants que nous avons été, ont innocemment espéré recevoir d’eux.

Un jour, nous ne serons plus leurs enfants. Et ce jour-là n’est pas forcement celui de leur mort physique. Certaines d’entre nous resteront les fils et les filles de leur mère et père, jusqu’à la fin. D’autres, apprendront à se défaire plus tôt de cette emprise, et se déconditionner de l’hypnose familiale, pour enfin devenir des parents libres, des adultes équilibrés, et non plus des fils de….

Je suis l’enfant naturel
D’un couple maudit
Je suis l’enfant écorché
D’une trop sale réalité
Je suis l’enfant violent
Dans c’putain d’occident
Je suis l’enfant rebelle
d’une société cancéreuse
Enfant rebelle
et la loi est dangereuse….

 

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1 réponse
  1. Nouria
    Nouria dit :

    Je me souviens un jour, en sortant de chez ma mère après avoir eu une conversation avec elle un peu surréaliste à mon goût , j’ai rejoins ma meilleure amie et je lui ai dit: tu sais, je crois que cette femme si c’était pas ma mère , j’aurais absolument rien à faire avec elle, rien à lui dire. Humainement, je crois que je ne l’aimerais pas.
    Et ça m’avait vachement chamboulée.

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