Prends une liste de 8 a 10 mots. Mets ton chrono sur 10 minutes.

Et invente une histoire. 

Voici ma liste de mots du jour, si t’as envie de tester, avant de lire mon histoire.

Un mot bizarre : Balbeck / Un personnage : Howeida, 50 ans, vieille fille
Un aliment : Menthe / Un fait divers : une bombe dans un cinéma
Un souvenir personnel : l’araignée à 7 pattes / Un concept : l’ombre
Un aliment : des spaghettis / Une couleur : rouge
Un titre de film : l’étoffe des héros

 

Version audio

“La plupart des enfants mentent à leur maître quand ils ont commis un délit”

La dictée avait mal commencé. Mente ou menthe ? Avec ou sans H. Pas la hache qui coupe, hein. Le H.  Pas non plus celui qui s’evapore en fumée dans les airs, je parle du h, qui est parfois aspiré, et qui ne s’entend. Le même hache qu’on trouve en plein milieu du thé.

Je me suis souvenu du conseil de mon père :

– Quand t’es pas sur de l’orthographe, fiston, tu remplaces le mot sur lequel t’hésites, par un autre, un synonyme.

Par exemple “ou” sans accent, tu peux le remplacer par « ou bien ». Et tu sais si c’est le bon mot ou bien le mauvais mot.

Merci Papa.

Alors, pour savoir de quelle menthe, il s’agissait, je l’ai remplacée par persil.

 

 

« La plupart des enfants mentent à leur maitre quand ils ont commis un délit » est devenue

La plupart des enfants persil à leur kilos
quand ils ont commis un des canapés.

Oui, ça sonne bizarre, mais qu’en sais je moi  de ce qu’a voulu dire l’auteur de ce texte?

J’en ai marre des dictées.

Les ombres sombrent. Le radeau des mers, veille. La tempête t’embête. Les mots me font mal. Le français sait, ou c’est ?
Je sais pas. Tout est possible dans cette langue barbare.
Mais non, c’est nous les barbares.

C’est comme l’araignée à 7 pattes. Un jour, Madame Burchill, ma prof de biologie, m’a puni parce que j’avais ramassé une araignée qui avait 7 pattes, et que je l’ai présentée ainsi dans mon texte de biologie.

– Mais tu es idiot ? une araignée à toujours un nombre pa de pattes. »

– Mais, celle la en a 7.

– Imbécile !!! c’est qu’elle en a perdu une. Une araignée ne PEUT PAS avoir 7 pattes, ça n’existe pas ! Tu n’as pas de cerveau ou quoi ? Les pattes, c’est toujours pair.

Bon, bah, si la réalité que j’ai devant moi n’existe pas, alors j’ai noté qu’une araignée avait 8 pattes, sauf celle-ci qui en a 7.  Et j’ai eu un 0. Comme a ma dictée.

Des zéros, j’en ai une panoplie. Et de toutes les étoffes. Je crois bien que ces zéros sont fatigués que je les collectionne. Et moi aussi.

Les zéros, c’est nul.

Et je suis rentré penaud à la maison, avec l’image de mon père en train de cuisiner des nouilles. Parce que les pâtes, c’est toujours père. C’est bien ce qu’a dit Mme Burchill. Même si chez moi, c’est plutôt mère qui prépare les pâtes, comme tout ce qu’on mange. Y compris ce pamplemousse, qui est amer. Et ces oranges qui sont rouges.

C’est ça être élève au collège de la Providence. Non, pas dense. Ou danse. Et n’imaginez pas mon proviseur qui danse.

Le français me terrorise. Mon père dit que la nuit, dans ma chambre je fais des cauchemars, à cause des fautes d’orthographe. Mais pour m’intégrer dans ce pays, il va falloir que je maitrise leur langue. Pas celle que je tourne dans ma bouche. L’autre.

Et puis, comment savoir ou est la réalité, quand on me dit que les araignées à 7 pattes ca n’existe pas ? Comment écrire les mots justes ? Pourquoi tel mot s’ecrit comme ca ? Comment le savoir ? J’ai peur de pas trouver les bons mots. Et ça me fait mal… mâle, femelle…. Malle…valise… non, juste mal…bobo

 

Voila, dès que j’entends un mot, dans ma tête, je le vois s’écrire de plein d’orthographes différentes. Baal Beck. Bas le bec. Sur mon tableau, il y a un arbre avec des racines florissantes qui poussent dans tous les sens. Alors, souvent quand les gens me parlent, je panique. Qu’est ce que j’aimerais pas paniquer.

Tu sais, je suis pas français moi. On m’a forcé à l’être. Lettre. Courrier. Lettre. Alphabet. l’être. Arbre. Non l’être et l’avoir.

Un jour, ma cousine Howeida, est allé au cinéma. Howeida, c’est une vieille fille de 50 ans, toujours habillée en noir, comme si elle portrait le deuil d’un mari qu’elle n’a jamais eu. Je l’ai connue que comme ça.

L’été dernier, elle a pris le train pour le Caire. Elle est allé au cinéma Miami. Il y avait une comédie romantique très populaire, et plein de jeunes dans la salle. Et aussi des couples. Elle était la seule femme seule.

Elle s’est assise au 9 rang, sur la droite, à côté de la sortie de secours, et a collé sous son siège une bombe artisanale. Puis elle s’est levée. Et elle est partie. Mais aucune fumée ne s’est éparpillée dans le ciel bleu du Caire, ce jour là.

Howeida me jure que c’est une histoire vraie, et que sa bombe doit encore être collé sous le premier siège de la 9ème rangée du cinéma Miami.

Un jour, peut-être j’irai vérifier.

Mais ce qui m’a le plus marqué dans l’histoire de Howeida, c’est qu’elle était assise sur un siège. Et c’était pas un état… de siège. Comme à Fort Apache. Parce qu’on ne s’assoit pas sur des états. Mais sur des fauteuils.

Comme dit papa, quand on sait pas, on met des synonymes.

Ah.. cette langue… on dirait qu’elle a été inventée pour nous en exclure…nous les barbares… nous les terrorisés… .ah, si moi aussi je pouvais y mettre une bombe, et la faire exploser . Mais je serai pas comme Howeida moi, j’oublierai pas d’appuyer sur le détonateur.

 

 

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4 réponses
  1. Daniel Mary
    Daniel Mary dit :

    Un beau poulet
    Quand on dit un beau poulet, on entend un beau pou laid. Mais un beau pou ne l’est pas puisqu’il est laid. Ne dit-on pas moche comme un pou. D’ailleurs c’est un point de vue humain parce que pour la mère pou, le petit pou est beau. D’autant que la mère pou est une vraie mère poule pour son petit autant que la mère poule l’est pour son petit poulet, qui d’ailleurs est un poussin. Et la mère pou ne met au monde que des poux sains.
    Donc un beau pou sain est un beau pou pour la mère pou et un pou laid pour la mère poulet, et un beau poussin est un beau poulet pour la mère poule. Et un petit poussin peut être très laid pour la mère pou, car la mère pou sait…
    La mère poule sait ce qui est bien pour son poussin comme la mère pou sait ce qui est bien pour son pou sain.
    Le petit pou sait ce qui le pousse à pousser, de même que le petit poussin est poussé par sa mère poule à devenir poulet.
    Si une mère pou a un petit pou laid, il devient un boulet pour sa famille qui le traîne. Et dès qu’un pou sait qu’il est un bout laid, il va tout faire pour faire le beau, pour devenir le coq du village. Car dès qu’un pou sain est choyé, il devient un coq en pâte.
    Il peut même arriver qu’une mère poule dise à son petit : tu es un beau poussin. Et que ce dernier se dressant sur ses ergots, se sente fier comme un pou.
    Mais là cela devient une histoire de fou.

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  2. Mélanie
    Mélanie dit :

    Telle l’araignée.

    Je l’observe, un peu à la dérobée, parce que ma curiosité est telle que je pourrais comme tout à l’heure la fixer au point qu’elle s’est redressée pour me demander d’une voix toute en contrition s’il y avait un problème. Mais je ne peux empêcher mes yeux de revenir sans cesse sur ce corps occupé à récurer le dallage. Elle est là, à quatre pattes, sa large silhouette s’agite nerveusement, et je n’arrive pas à faire le lien, est-ce bien la femme dont on m’a parlé? Est-ce bien cette ex-starlette à la beauté ravageuse qui nettoie consciencieusement un à un les joints du salon?
    C’est une voisine qui m’en a touché un mot quand elle a appris qu’Howeida était à mon service, Howeida m’avait été recommandée par une expat, une femme délicieuse mais peu au fait de nos exigences en terme de réputation. Quoi qu’il en soit cette voisine que je ne nommerai pas m’a dit, en pleine collation et tout sourire: « Howeida ma chère! L es mâles de votre maison ont donc l’étoffe des héros! »
    Je n’ai pas manqué de lui répondre pour conserver la main: « L’étoffe des héros… c’est un titre de film n’est-ce pas? De qui est-ce déjà? »
    Elle a balayé d’un geste vif ma question et m’entraînant par le coude dans un angle de la terrasse, elle me déroula en trois phrases la courte biographie de mon employée. Il va sans dire que je m’en trouvais atterrée.
    Il m’a fallu bien peu de temps depuis pour recoller les morceaux de cette rumeur, ma foi, bien fondée. Howeida dans sa jeunesse et jusqu’à la veille de ses trente ans fut une jeune fille puis une jeune femme dont la beauté capiteuse attirait tous les regards, hommes, femmes, enfants, tous étaient saisis par ses charmes. Des yeux d’un vert brillant, couleur menthe à l’eau, des lèvres naturellement rouges et luisantes comme des bigarreaux, un sourire angélique qui s’accordait avec un caractère timide et vertueux, tout la prédestinait à un avenir radieux. Le père veillait à ses fréquentations, veillait surtout à ce qu’elle n’en eut pas! Nombre de prétendants firent bien sûr leur cour au patriarche mais aucun ne fit jamais l’affaire, on finit donc par en déduire que l’homme voulait garder sa fille au foyer, une assurance pour ses vieux jours.
    Et puis, aller savoir comment, et quelle mouche l’avait piquée, l’ombre au tableau, un matin elle n’était plus là, elle avait simplement laissé un message: « je serai actrice, je crèverai l’écran et je reviendrai. »
    Elle avait pourtant passé l’âge de jouer les jeunes premières.
    On n’entendit plus parler d’elle et puis un jour, cette publicité qui fit l’effet d’une bombe dans un cinéma du quartier: Howeida, quasiment nue comme un ver, en bikini, sans plus de décence qu’une occidentale, qui avalait une armée de spaghetti dans une référence maladroite à « La belle et le clochard » pour vendre des séjours napolitains. On reconnut ses yeux verts, on reconnut son sourire, on découvrit tout bonnement tout le reste sur grand écran. La famille fut anéantie, il y eut des rumeurs de vengeance et puis, après longtemps, on oublia presque.
    Plus tard, Howeida est revenue vivre au quartier, elle n’a jamais fait fortune, ni au cinéma, ni dans la publicité, et depuis elle effectue les tâches ingrates que la charité daigne lui offrir, elle vivote. Évidemment sa réputation est ruinée et bien que je ne doute pas de ce que m’a confié Mme Balbeck qui m’a assurée qu’Howeida avait conservé toute sa vertu, je vais bien entendu lui donner son congé dès ce soir.
    J’ai souvenir de cette histoire d’araignée, une araignée à sept pattes, tout le monde dans mon enfance en parlait, « elle est extraordinaire, elle a sept pattes, c’est une rareté ». Mais en vérité tout cela n’est que rumeur, personne n’a jamais vu cette araignée, personne non plus n’a jamais vu Howeida du temps de sa beauté…

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  3. Valérie
    Valérie dit :

    Qu’il est plaisant à lire, ce texte. Et ce petit gars, ou cette petite fille, vraiment très touchant(e). Jusque là, j’avais une réticence à lire ces productions de texte à contrainte. Mais comme tu l’as très justement partagé je ne sais plus où, je réalise à quel point (mais pourtant je le savais déjà !) ces contraintes permettent de faire émerger des petites merveilles qui sonnent juste et qui disent beaucoup. Merci pour ce moment.

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    • Namir
      Namir dit :

      Oui. La fiction souvent, je m’en rends compte, nous amène à être plus vrais que vrais. C’est je crois l’intérêt de ces contraintes d’ecriture. Il y a une epoque, pendant 3 mois, tous les matins, j’inventais un recit de 10 minutes avec des mots piochés.
      Et puis, jai meme tenté pendant 30 jours consecutifs, d’ecrire une seule histoire, a partir d’exercices quotidiens de 10 minutes, avec des mots piochés. Je n’ai jamais relu le resultat. Je le ferai prochainement pour voir avec le recul si le resultat a un interet.

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