Prends une liste de 8 a 10 mots. Mets ton chrono sur 10 minutes. Et invente une histoire. 

Voici la liste de mots du jour, si t’as envie de tester, avant de lire mon histoire.

Un mot bizarre : Térébenthine  / Un nom propre : Esculape
Un odeur : celle des marrons chauds  / Une couleur : Turquoise
Un son : musique arabe /  Un souvenir : Un enfant que je m’amusai à effrayer
Un personnage : Albert l’intellectuel, prof d’université
Un secret :  il aime les enfants /  Une chanson :  rien de rien…

Version audio

Oncle Albert, c’est comme ça qu’on l’appelait (même s’il faisait pas partie de la famille), quand il venait à la maison, avec ses grosses lunettes,  sa jaquette à carreaux, et son pull turquoise sans manches. C’était un ami de papa. Un intellectuel.  Il amenait des fleurs pour maman, qui lui préparait son plat préféré : des marrons chauds avec de la viande de canard.

Je me souviens de lui, assis dans notre salon avec de la musique arabe. Il parlait beaucoup. Il avait l’air gentil. Très gentil. Mais moi, j’aimais pas ses lunettes. On aurait dit qu’il n’avait pas d’yeux. C’était moche.

Cette après-midi, j’avais fait peur a mon frère. Vraiment peur. Ernest a beaucoup pleuré. Mes parents étaient partis faire les courses, et moi je lui ai parlé, du monstre, du démon, et il a eu un une crise de panique. Ça m’a fait beaucoup rigoler.

Mais le soir, quand il est allé dormir, et qu’il ne voulait pas aller au lit, je me suis souvenu. Heureusement, oncle Albert était la, il a pris la main d’Ernest et lui a dit. 

– Allez viens, je vais te raconter une histoire.

Et ils sont allés dans notre chambre commune. J’étais content, je mangeais des chocolats dans le salon. Et puis, pourquoi, il y a eu cette chanson ?

– Non, rien de rien… non je ne regrette rien… »

Et j’ai revu mon frère, sa terreur. Et soudain, j’ai eu peur qu’il raconte tout à Oncle Albert.

Non.

J’ai avancé dans la chambre. Et j’ai vu Ernest dans son lit, et Oncle Albert penché à côté de lui. Il avait la main sous la couverture, et il chuchotait à Ernest.

– C’est un secret… mais c’est un secret qui fait du bien… Cela s’appelle le serpent d’Esculape, parce qu’Esculape , il l’a reçu des dieux….

Ernest avait l’air détendu, et soulagé. Il suçait son pouce, et fermait les yeux. Je n’ai pas compris ce qui se passait . Enfin, si, peut-être.

Et je suis retourné dans le salon, terrorisé.

– Non, rien de rien… ni le bien , ni le mal, tout ça m’est bien égal.

Le matin, je me suis réveillé tôt.
Ernest allait bien. Il jouait. Je l’ai scruté, guetté. J’ai joué avec lui. Son camion était abime. J’ai pris la bouteille de térébenthine de mes parents, et je l’ai nettoyé de fond en comble, pour qu’il brille. Il n’y avait plus une tache sur son camion. Comme neuf.

Ernest semblait content.

– Hé, pourquoi tu pleures, Alex ?

– Mais non, je pleure pas, c’est cette odeur. Mais tout va bien… et toi, ça va ?

– Oui. Je vais bien

 

Non, rien de rien. Je ne regrette rien… 

 

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2 réponses
  1. lili
    lili dit :

    Edith Piaf, savait-elle ce qu’est un apprentissage précoce, comment ça peut influencer les comportements bien, bien plus tard sans qu’on en comprenne le sens? Peut-être qu’elle était immunisée, elle?
    Surprenant ce qu’un article de blog peut amener comme réflexion 🙂

    Répondre
  2. nathalie
    nathalie dit :

    Ça m’a pris plus de dix minutes, j’ai triché. Du coup, c’est un peu long … Bonsoir Namir.

    J’ai envie de raconter l’histoire d’un drôle de bonhomme, que je connais depuis longtemps et qui m’étonne toujours.
    Il s’appelle Albert. Quand on était petits, on était dans la même classe. Il avait de grosses lunettes, myope comme une taupe le gamin ! Et il était si doué, si fort à l’école que tout le monde le détestait, sauf le maître. On l’embêtait tous, le pauvre Albert. En plus, il portait un prénom sacrément démodé. On lui faisait peur, dans la cour, on le menaçait de lui casser ses lunettes. Même moi, astigmate comme pas deux, je prenais part à cette torture. Quand j’y repense, je me dis qu’on s’était comporté comme des petites ordures cette année-là. On devait être en CE2. Albert, il avait toujours les meilleures notes, il savait tout. On l’appelait l’intello de service. Ses parents étaient fiers de lui. Tellement fiers. Eux, ils possédaient un petit atelier d’ébénisterie qui sentait la térébenthine jusque dans la rue. Sa mère venait d’Algérie, son père était d’ici, de Normandie. Quand on passait devant l’atelier, on entendait au choix, de la musique arabe, ou bien Piaf, qui criait « Non, rien de rien, non, je ne regrette rien, ni le mal… ». Un jour, sur le trottoir de l’atelier, après l’école, j’ai entendu cette chanson, et je me suis sentie bizarre. D’un coup, je regrettais tout le mal que nous faisions à Albert. Il marchait devant moi, est entré dans l’atelier odorant et je lui ai emboité le pas :
    Albert !
    Va-t-en ! Fiche-moi la paix !
    Albert ! J’ai un truc à te dire. C’est important !
    Va-t-en, j’te dis !
    Albert, tu veux bien être mon ami ?
    Tu te fiches de moi ? T’es comme les autres !
    Bah, tu sais, on a des grosses lunettes tous les deux, et je vais te dire un secret : moi aussi, j’ai la trouille qu’on me les casse, mes lunettes ! On serait les amis à lunettes. Deux contre les autres ? On serait plus forts, non ?

    La maman d’Albert est sortie de l’atelier juste à ce moment.
    Albert ? Pourquoi tu ne rentres pas ? Oh, tu as une amie ? Venez mes chéris. Tu t’appelles comment Habiba ? Venez, il y a des crêpes pour le goûter. Ne restez pas dans le froid, comme ça !

    Albert, un peu désemparé, m’a fait signe de le suivre. Et on a parlé, tout en dévorant les crêpes de Madame Berteau. Elles étaient tellement bonnes, dégoulinantes de miel.

    Tu ne m’as pas dit comment tu t’appelais, trésor ?
    Sophie, madame. Elles sont drôlement bonnes, les crêpes !
    Bon, les enfants, je vous laisse, j’ai du travail. Tu me donnes le numéro de tes parents, que je les prévienne que tu es ici pour un moment encore, à ce que je vois de ton appétit !
    Il y a aussi des marrons chauds, si vous voulez, ils sont presque cuits ! C’est la saison, nous les avons ramassés dimanche dernier.
    C’est vrai que ça sentait drôlement bon, entre les crêpes et les marrons… Et la thérébentine.

    Et Albert s’est mis à parler. J’étais contente, je crois que j’avais un nouvel ami. Il m’a raconté l’histoire d’Esculape, le dieu de la médecine, il m’a dit qu’en Grèce, on l’appelait Asclépios. Il m’a dit que comme il fait des bonnes notes, ses parents voulaient qu’il soit médecin. Et que comme il adorait ses parents, il leur ferait plaisir, et il deviendrait un grand médecin. Un grand professeur, qui enseignerait à l’université. Qui ferait de la recherche pour soigner les gens. Et surtout les enfants.
    Parce qu’il n’aimait pas l’idée que les enfants soient malades.

    Mais que ça le rendait triste. Parce que lui, son rêve, c’était de devenir clown, pour faire rire les enfants et les parents aussi.
    Je ne sais pas pourquoi, je lui ai dit que j’étais sûre qu’il serait les deux.

    Je suis rentrée chez moi à la nuit ce jour-là. Madame Berteau m’avait raccompagnée. Et j’étais super heureuse.

    Avec Albert, on est restés amis, jusqu’à aujourd’hui. Croyez-moi si vous voulez, mais après de brillantes études, il est devenu professeur en pédiatrie, de renommée internationale. Il forme de jeunes médecins. Il travaille dans un grand centre hospitalier universitaire. Il adore les gosses. D’ailleurs, il en a huit… Deux à lui, et les autres adoptés. Une jolie tribu !
    Je n’avais pas eu de ses nouvelles depuis longtemps, mais l’autre jour, il m’a appelée, et m’a dit :

    Tu sais, Sophie, je viens de repenser à notre première discussion, quand on était gamins, tu t’en souviens ? Tu peux venir demain matin à l’hôpital, je te promets une surprise.

    Avec plaisir, Albert ! Quelle heure ?

    Rejoins-moi dans mon bureau à 9h00. On ira visiter les enfants ensemble. Tu peux même prendre ton appareil photo si tu veux. J’ai les autorisations des parents. Je compte sur toi ?

    Euh.. oui. D’accord. A demain.

    Le lendemain matin, je frappe à 9h00 pile à la porte du bureau du professeur Albert Berteau.

    Entre !

    Je pousse la porte et quelle a été ma surprise de voir Albert derrière son bureau en habit de clown turquoise, avec un joli nez rouge au milieu du visage, sous ses lunettes.

    J’en suis restée bouche bée.

    Je t’explique, me dit celui-ci, hilare.
    Tu te souviens de notre premier goûter dans l’atelier de mes parents ?

    Si je m’en souvenais ! Surtout les odeurs, térébenthine, crêpes et marrons chauds mêlés, ça ne s’oublie pas comme ça !

    Il y a deux ans, je me suis souvenu que tu m’avais dit que je serai les deux. Eh bien, je me suis dis que tu avais raison. Qu’il fallait aller au bout de ses rêves. Et que je serai clown. J’ai pris un congé sabbatique et je me suis inscrit à des cours de clown. Pendant un an, j’ai travaillé le jeu du clown. Je n’ai jamais été aussi heureux de ma vie ! Sauf peut-être quand un nouvel enfant arrivait dans la maison… Et depuis que j’ai repris mon activité de professeur, je visite mes petits malades dans ma peau de clown ! Et tu veux savoir ? Les enfants n’ont plus peur de moi et nous obtenons des résultats encourageants en matière de guérison… Les enfants qui guérissent guérissent plus vite. Et je les vois rire, au moins sourire, chaque matin, malgré les souffrances que les traitements leur font endurer. Je voulais que tu voies ça. Tu as ton appareil ? Tu es prête ? On y va ?

    On y va ! dis-je mi-souriante, mi-les-larmes-aux-yeux. Décidément, cet Albert, il me surprendra toujours.

    Mais pourquoi cette couleur, pourquoi turquoise, et pas rouge ou je sais pas ?

    Parce que cette couleur, d’abord elle me va bien, je trouve, et puis elle calme les enfants.

    Oh…

    Dans les couloirs, j’ai suivi Albert dans son habit de clown, je l’ai vu se pencher vers les enfants et leur raconter ses histoires de clown, je l’ai vu, en même temps qu’il donnait ses ordres pour le suivi des petits malades, leur faire des tours de cartes, faire sortir des fleurs de ses manches et un lapin en peluche de son chapeau. J’ai vu des étoiles dans les yeux des gamins. J’ai vu tout le personnel de l’hôpital saluer ce clown d’un sonore Bonjour Professeur !
    Tout avait l’air si normal.

    Mais tout a toujours l’air normal dans les rêves, n’est-ce pas ?

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