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Je ne sais pas comment s’est passée l’entrée dans le monde des grands pour toi.

Pour moi, ça a été assez violent.J’étais un enfant plutôt naif, et pas vraiment au fait des questions sexuelles jusqu’à l’age de 10 ans.

Et je crois que j’aurais bien aimé en rester là.

A la maison, on ne parlait jamais de ces sujets là. Mes parents ne s’embrassaient pas devant nous. Et pour moi, ils avaient du coucher ensemble deux fois dans leur vie. Une fois pour moi, l’autre pour ma sœur. Et encore.

Je pense meme que l’idée d’envisager cela à l’époque, m’etait insupportable.

Ma mère était une femme respectable. Elle ne pouvait donc décemment pas pratiquer le sexe. Dès qu’il y avait un film a la télé, ou l’on voyait des corps denudés, ou des manifestations de désir sexuel, ma mère me faisait fermer les yeux

 

«  Il n’y a que dans les films francais qu’on voit des choses aussi dégoutantes…. …. »

 

Je ne comprendrai ses réactions, que bien des années plus tard. Autant dire, que j’avais pas été préparé à accueillir cette vague qui allait me submerger, ce matin de février 1985.

 

 

J’étais arrivé en retard dans ma classe de CM2. Le cours avait déjà commencé. En me dirigeant vers mon siège, au troisème rang, j’ai froncé les sourcils. Un nouvel élève  était assis à ma place. Mme Boutel m’a fait signe de m’installer au fond, à côté de Roxaneh.

Le nouvel élève tourna la tête vers moi. Et j’ai été soudain troublé par ce visage androgyne aux traits si fins, cette peau halée et douce, et ces yeux couleur amande, légèrement bridés.

A cause de ses cheveux courts, je l’avais prise pour un garçon. Elle s’appelait Anne- Laurence.

Depuis le dernier rang, je l’épiai avec fascination. Tout mon corps était pris d’une forte agitation, et d’un tumulte inexpliqué. Était-ce mon égo de garçon qui s’était fait piquer sa place ? Ou l’expression d’un combat intérieur contre des pulsion naissantes que, sans connaître, je combattais déjà.

Pendant des semaines, J ai passé mon temps à dénigrer Anne-Laurence, et dire du mal d’elle à mes amis garçons, répétant à quel point je la détestais, et la trouvais stupide. Et trouvant n’importe quel prétexte pour parler d’elle, et nourrir cette délicieuse agressivité.

Elle m’obsédait, et en même temps, j’étais incapable de lui adresser la parole. Des pulsions inconnues m’agitaient, incontrôlables. Comment canaliser cette énergie ? Et quoi en faire ?

La réponse ne tarda pas.

Un jour, à la sortie du collège, je l’ai aperçue marchant avec sa mère.

J’étais avec un pote, et j’ai voulu frimer. Alors, avec  aplomb, je me suis dirigé vers la maman

 

« Bonjour madame, est ce que vous pourriez dire à votre fille d’arrêter de faire la pute en classe ? »

 

Elle m’a dévisagé, surprise. J’aurai pu m’arrêter la. Mais c’était comme un engrenage. Je ne pouvais pas faire marche arrirere. Je me souviens lui avoir repondu

« Merci, madame la pute ! »

 

J’ai voulu reprendre mon chemin comme si de rien n’était. Elle m’a rattrapé, pris mon nom.

Et le lendemain, j’ai été convoqué avec mon père par la direction de l’école.

 

Je me souviens de ce moment :  debout, tête baissée à côté de mon père, et de la directrice qui ne comprenaient rien à ce qui s’était passé. Je n’osais pas regarder ma maitresse dans les yeux, tellement j’avais honte.

Je portais le poids de ma propre honte, et celle de mon père.

L’humiliation était totale.

J’ai vu une de mes larmes tomber sur ma chaussure. 

 Je savais que plus rien ne serait jamais comme avant, désormais

Un nouveau monde était en train de s’ouvrir à moi.

Et je n’en voulais pas.

La maitresse et la directrice étaient stupéfaites. Jusque là, j’étais un garçon sage et sans problèmes. Mon père était démuni. La maitresse a expliqué que si j’avais agi ainsi, c’était surement sous la mauvaise influence de Josselin Blaise, le rebelle de la classe.

Ce dernier s’est retrouvé avec un blâme.

Et moi, avec la honte supplémentaire, de passer pour un traitre,un collabo, qui avait lâchement dénoncé un pote.

La fin de l’année a été chaotique.

Maudite puberté, que je t’ai haie.

Comme j’ai haï ces poils qui ont commencé à pousser sur mes jambes, puis autour de mon sexe, et sous mes aisselles.

Comme j’ai haï cette voix qui allait commencer a muer.

Et comme j’ai haï pardessus tout ce désir qui montait en moi, incontrôlable, animal, et faisait de moi quelqu’un que je ne voulais pas être

J’aurai préféré rester cet enfant naïf.

Grandir, je voulais pas.

C’est à travers cette expérience pitoyable que j’ai mis le pied dans le monde des grands.

Mais d’où venait donc ma honte ?
Pourquoi ai je accueilli la naissance de mon désir avec autant d’agressivité ? Qu’est ce qui a fait que je rejetais autant ma sexualité ?

Je n’avais pas  été préparé à cela. 

Des années plus tard, les pièces du puzzle de ma lignée familiale commenceront à se recomposer, et je pourrai donner du sens à cet évènement, et à la replacer dans une histoire plus large.

Un histoire qui a pris sa sources aux bords du Nil, dans un petit village de Haute- Égypte, pendant l’été 1941.

Je t’en parle demain, promis

Et toi, raconte, comment as tu rencontré le désir, la première fois ?

 

 





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1 réponse
  1. Nouria
    Nouria dit :

    J’étais au CP.
    Il s’appelait Sébastien. Je le trouvais très beau.
    Il m’a demandé si je voulais bien qu’on se fasse un bisou comme les grands.
    J’ai dit oui et on s’est caché derrière une porte et là, alors.que je croyais qu’il allait me faire un bisou sur la bouche,quand sa.bouche s’est approchée de la mienne, il a léché mes lèvres.
    Je ne savais pas si je trouvais ça dégoûtant ou délicieux. Ça m’a profondément bouleversée.
    Je crois que je suis tombée folle amoureuse de lui à ce moment-là.
    Et puis le lendemain il a.fait la même chose avec ma copine Laetitia. J’ai été très jalouse et très triste.J’ai détesté Laetitia.
    Il ne m’a plus jamais leché les lèvres.

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