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– Papa, comment on sait si l’autre, il est consentant ?

– Ah, c’est très simple en fait. On lui demande. Quand il dit non, c’est non.  Et oui, c’est oui

– Et si l’autre dit non, et qu’on l’oblige quand même ?

– Alors, là, c’est de la violence, de la domination, de l’emprise, enfin… c’est pas bien quoi. Et la relation se divise en deux camps : L’ agresseur et l’agressé.

– Ben moi, papa je suis pas consentant pour faire mes devoirs. Ni ranger ma chambre. Ni mettre la table.

– Euh, c’est bien tenté, mais tu vas les faire quand même.

– Pourquoi ?

–  Parce que je suis ton père. Et que tu fais ce que je te dis !

– Ah, ouais… le consentement c’est pas pour tes enfants, c’est juste pour tes articles de blog, c’est ça ?

Euh, comment dire…

 

 

Faut bien admettre que c’est pas clair pour moi, ces histoires de consentement. Parce que des fois, oui, c’est non. Et non, c’est oui.

En Égypte, quand tu payes un marchand, il te répond non et refuse ton argent en moyenne 4 fois, avant de finir par accepter tes sous. Pour t’obliger à insister lourdement et offrir ce que l’autre attend de toi. Dire non, c’est juste un moyen poli de dire oui.

Une relation consentie passe par respecter le non du partenaire. Mais déjà, il faut avoir la capacité de l’entendre, le non du partenaire (je t’invite à lire mon article intitulé Le voile d’oubli)
Et surtout, comment on fait pour dire non quand on ne sait pas, ou ne peut pas le faire ?
Dans un état de sidération, ou de choc, le corps est incapable physiologiquement pas dire non. Combien de femmes chez leur gynécologues, se sentent salies ou violées parce que le médecin, homme ou femme, ne les a pas prévenues qu’il allait les toucher, et l’a fait sans leur demander la permission ?

Et face à leur silence sidéré, leur incapacité à dire non, s’ouvre alors le chemin du malaise et de la honte. Alors qu’au départ, elles étaient consentantes à aller chez le gynéco.

Récemment, je prenais un verre avec une amie. C’était sympa. J’étais sur le point de rentrer, parce que j’avais du boulot, et j’étais fatigué.

– J’ai faim. Ça te dit qu’on aille manger un bout ?

Et j’ai répondu  « oui ».
Pourtant j’en avais pas du tout envie.
Le plus étonnant, c’est qu’avant de dire oui, j’ai pris le temps de sonder mes ressentis. Et que tout mon corps disait « non »
Mais j’ai répondu oui.
Comme ce moment où, face à une collègue, dans ma formation d’hypno-sexologie, elle m’a demandé :

– Sur quoi tu veux travailler, Namir ?

– Franchement, j’ai abordé beaucoup de sujets assez lourds cette semaine, et je suis pas sûr que ce soit une bonne idée de travailler encore sur mon rapport à la sexualité.

– Prends le temps et pose toi la question, si tu as envie ou non de faire cette séance.

Et devinez quoi ?
Ça a encore répondu « Non » à l’intérieur. Et j’ai fini par dire oui.

A quoi donc ai-je dit oui, alors que mon corps disait non :  au désir de l’autre ? A ma sécurité émotionnelle ? A la paix sociale ?

Avec cette fille au restaurant, qu’est ce qui m’a poussé à accepter de rester alors je ne voulais pas ?

Avais je envie de lui faire plaisir ? Non.
Avais je peur de dire non? Oui
Peur de la décevoir ? Oui
Peur qu’elle se sente rejetée ? Oui
Peur que je me sente rejeté ? Oui
Peur d’être un garçon désobéissant ? Oui

Un jour, je grandirai, et deviendrai un adulte, pas con, s’entend. Et je serai suffisamment confiant en moi,et dans les autres, pour être en paix avec le non. 

Avec mon amie, on a passé un long moment au restaurant, à discuter. Puis, prenant mon courage à deux mains, je lui ai avoué que j’avais dit oui à sa demande, alors que je n’en avais pas envie
Elle m’a écouté, attentivement, m’a rassurée.
M’a dit que j’étais libre, et qu’elle ne l’aurait pas mal pris, si j’étais parti.
Elle l’aurait parfaitement compris, et ma remercié de le lui avoir dit.
Je me suis senti soulagé, rassuré, compris.
J’ai aimé la qualité de notre dialogue. Et mon non s’est transformé en vrai oui.

Ça commence peut-être par la, le consentement : apprendre à s’écouter intérieurement avant de répondre oui ou non à une demande. Cesser la violence contre nous mêmes lorsqu’une part de nous veut prendre le contrôle sur l’autre. Recréer du dialogue, et de la fluidité en nous, et faire en sorte que nous ne devenions pas nos propres agresseurs. C’est le meilleur rempart contre la culpabilité et la honte, ou le fait de se décharger sur l’autre de notre propre responsabilité.

« C’est de ta faute. J’en avais pas envie. J’aurais jamais du t’écouter ».

Chacun de nous est responsable de la manière dont il gère sa relation à soi.

Cela signifie aussi que nous ne sommes pas responsables si l’autre en face est triste ou déçu parce que nos prenons soin de nous. Cela n’est ni un manque de respect, ni un manque d’amour.

Et puis, tu sais, t’as pas à t’en vouloir. Si tu réponds oui, alors que ton corps dit non, j’imagine que tu fais au mieux. Ce qui pourrait t’aider, serait d’aller rencontrer ce qui a dit oui en toi, sans te juger. Parfois, c’est un enfant blessé qui a besoin d’être rassuré (cf mon article sur tuer l’enfant intérieur)
En cela, le travail personnel, ou les cercles d’écriture peuvent t’être bien utile.

Nous sommes aussi libres de dire oui à l’autre, même lorsque notre corps dit non. L’important, au fond, c’est juste de savoir pourquoi on le fait.

Cela ne nous mettra pas toujours à l’abri des agressions du monde extérieur. Et du fait que des fois, on subira des violences. Mais nous ne sommes pas tout puissants. Nous ne pouvons pas contrôler le flux de la vie, les ouragans, et les bourrasques du monde extérieur.

Je crois juste qu’elles nous atteindront moins, si nous apprenons a consolider notre édifice interne, celui de l’estime de soi, et de la confiance inébranlable dans la vie, c’est à dire notre capacité à nous aimer, et nous connaître.

– Ok,  papa, mais est ce que je suis toujours obligé d’aller prendre ma douche, alors que j’en ai pas du tout envie ?





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6 réponses
  1. lili
    lili dit :

    Un jour, j’ai demandé à Mimiss si elle voulait bien m’aider à préparer le dîner. Elle m’a répondu « Maman, j’ai le droit de dire non? » J’en suis restée toute paf ! Ben, Mimiss, si je te pose une question, je sais que la réponse peut être oui ou non… Elle m’a répondu qu’elle n’en avait pas envie et je suis allée préparer le repas le cœur léger. L’apprentissage du consentement, en effet, en tant qu’enfant, c’est aussi apprendre à oser dire non… (et peut-être, en tant que parent, à accepter un non?)

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  2. Valérie
    Valérie dit :

    Et moi je crois même que lorsque l’édifice intérieur est solide, qu’on sait entendre et affirmer sa limite, alors les situations d’abus, sous quelque forme que ce soit, ne se présentent pas.
    C’est à cela que servent les abus : nous apprendre que nous ne sommes pas (encore) au clair avec nos limites.

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    • Nouria
      Nouria dit :

      Je trouve ça terrible et affreusement culpabilisant c que tu dis Valérie.
      Heureusement, il y a bien d’autres moyens d’apprendre que nous ne sommes pas encore au clair avec nos limites que les abus .
      Et non ce n’est pas parce que nous ne sommes pas au clair avec nos limites que cela justifie des abus, quels qu’ils soient.
      C’est comme les punitions ou les fessés pour les enfants, ça ne leur apprend rien d’autre que d’avoir été puni ou d’avoir été battu.
      Les « abus » (mot fourre tout qui ne veut pas dire grand chose au final) , ça n’apprend rien d’autre que d’avoir été abusé…
      En tous cas, c’est mon point de vue.

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      • Valérie
        Valérie dit :

        Il n’y a rien de culpabilisant dans ce que je dis. C’est une histoire de responsabilité, à distinguer de la culpabilité. On est responsable de tout ce qu’on vit, c’est comme ça. Et heureusement, d’ailleurs, sinon on pourrait être victime du hasard, de la malchance, des « méchants » ou du cancer du pancréas.
        Mais prendre sa responsabilité, c’est vrai, n’a rien de confortable.

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  3. Elo
    Elo dit :

    « Et puis, tu sais, t’as pas à t’en vouloir. Si tu réponds oui, alors que ton corps dit non, j’imagine que tu fais au mieux. Ce qui pourrait t’aider, serait d’aller rencontrer ce qui a dit oui en toi, sans te juger. Parfois, c’est un enfant blessé qui a besoin d’être rassuré. (cf l’article sur le consentement). En cela, les travail personnel, ou les cercles d’écriture peuvent t’être bien utile. Nous sommes aussi libres de dire oui à l’autre, même lorsque notre corps dit non. L’important, au fond, c’est juste de savoir pourquoi on le fait. »

    Non non et non, c’est le truc que j’ai écris en premier lors du dernier cercle ou j’ai participé. Alors forcément ton article du jour à sa place aujourd’hui !

    Et je me souviens de ce jour en formation hypno ou j’ai dit Non. J’étais tellement mal et en colère ce jour là !!! Tout se mélangeait ! Le oui… le non… les conséquences de chacun des mots aussi … et puis mes émotions, mon cœur qui battait beaucoup trop fort, et mes jambes qui ont décidées de se barrer avant mon cerveau ! Mémorable moment.

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  1. […] Là où sa ce complique, c’est quand tu crois que tu es consentant, alors que c’est pas le cas. […]

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