Dans  son livre «  Pourquoi écrire va vous rendre heureux » , Natalie Goldberg décrit une expérience étonnante. Un stage d’écriture où des participants partagent leurs textes devant les autres, sans que personne ne commente, ni ne donne son avis.

Jusqu’ici, dans mes stages, j’avais toujours privilégié la valorisation des participants, cherchant à mettre en avant leurs qualités.

Mais avec le temps, je réalise que valoriser quelqu’un, en lui disant que ce qu’il a écrit c’est beau, c’est juger son travail.  Ça sous-entend que cela peut être laid, et activer des peurs. Comme celle décevoir, ou de ne pas réussir à faire un deuxième texte, aussi bon que le premier.

Et surtout, la valorisation présente un inconvénient majeur : Car toucher les autres avec ton écriture, peut t’amener à te perdre.

Plaire au lecteur ne devrait pas être un but en soi.

Au mieux, une éventuelle conséquence de l’expression de ta vérité.

Même si généralement ta vérité tu la trouves quand tu commences enfin à oser déplaire.

Il y a un préalable à savoir si ce que tu écris est appréciable par les autres ou pas, c’est de sillonner ton chemin, et t’assurer que ce que tu écris reflète pleinement ce que tu cherches à exprimer.

Et c’est pas évident de le savoir.

Notre environnement nous configure en permanence, et notre besoin d’appartenance fait le reste. Quand par exemple, les gens me sollicitent pour me demander conseil, ils me « configurent » en  professeur, en sachant.
Je me retrouve parfois à me conformer à leurs attentes, et à adopter ce rôle, presque malgré moi, et sans en être conscient.

Dans ce premier cercle d’écriture, nous étions 8.
L’absence de retours, après la première ronde de lecture de nos textes était déstabilisante. Inconfortable même.

Dans ce silence, mon mental a commencé à s’agiter :  L’incertitude de savoir ce que les autres pensaient de mon travail, puis le jugement par rapport à mon écriture, le besoin de me comparer aux autres pour me rassurer, et la gêne de me rendre compte de tout cela.

Mais lorsque mon agitation, n’a trouvé en écho que la profondeur d’un silence paisible,  quelque chose d’étrange a commencé à se produire.

Comme une main qui se pose sur mon épaule, mon esprit a commencé à se calmer,  et le silence s’insinuer en moi.
Et j’ai commencer à écouter les autres.

Troisième tour. Quatrième tour.

Chercher à toucher ou à plaire perd progressivement de son intérêt.

Dans le silence, j’entends au loin une voix souriante :

« Hey Namir, on s’en fout, que tu cherches à nous toucher. »

Et la, tu te retrouves à rencontrer le moment magique ou tu quittes la rive de : «  J’écris pour convaincre, prouver, obtenir l’approbation, être aimé »,  pour enfin apercevoir la rive de « J’écris ce que j’ai à écrire »

Et tu commences à enlever ta carapace, ce que tu te retiens t’exprimer, ton envie de bien faire, tes automatismes, ton désir de maitrise.

Dans ce silence des autres, il y avait une présence qui valait  tous les encouragements et toutes les valorisations du monde. Une invitation a explorer, à aller plus loin dans l’expression de ta vérité.
Continuer à déshabiller ton écriture, pour voir a quoi ressemble ta nudité. Quand même toi, tu ne peux plus la juger à travers le regard des autres.

Dans un film de Woody Allen, un homme qui chantait aussi bien que Caruso lorsqu’il prenait sa douche, perdait toute son expressivité quand il montait sur la scène d’un grand opéra.

Quand il était seul, il arrivait à se relier à son cœur, et à sa sensibilité, mais que dès qu’il voyait un public, il ne ressentait plus d’émotion, et son chant devenait fade.

Son manager a eu une idée assez inattendue. Il a installé une vraie douche en plein milieu de la scène de l’opéra.

Le chanteur est arrivé en peignoir, s’est déshabillé, est entré dans la cabine, à ouvert le robinet, et s’est mis à chanter magistralement, devant un public ébahi. Tout en prenant sa douche.

Cela résume assez bien ce que nous avons fait dans ce cercle d’écriture.

Une des participantes m’a confié n’avoir saisi qu’après coup, la puissance de l’exercice.

Il ne s’est pas tant joué au niveau de l’écriture, que dans le fait de trouver en elle la capacité à affirmer qui elle est, sans en attendre aucun retour.

Et ça, c’est sacrément libérateur.

 

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8 réponses
  1. Emmanuel
    Emmanuel dit :

    « J’écris ce que j’ai à écrire »
    « Continuer à déshabiller ton écriture, pour voir a quoi ressemble ta nudité »
    Beaux coquillages ramassés sur la plage.

    Répondre
  2. Orianne
    Orianne dit :

    Merci Namir d’être revenu sur cette première expérience fabuleuse. Je l’ai trouvé très puissante et je me suis bien reconnue dans cette phrase que tu poses « continuer à déshabiller ton écriture pour voir à quoi ressemble ta nudité ». Ça m’a connecté à ma vulnérabilité que j’ai osé dévoiler lors de ce cercle « silencieux ».

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  3. Isabelle T
    Isabelle T dit :

    Ouahou ! Le choc de cette proposition !
    Merci Namir pour cette ouverture et cet autre regard.
    Je me suis immédiatement identifiée et ai ressenti physiquement la gorge qui se noue devant le silence des comparses face à mon texte. Régulation des émotions. Respiration.
    Se mettre dans l’écoute des autres, et arrêter de se juger, de juger l’autre. Juste écouter et ressentir. Ou pas.

    Belle journée.

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