Version audio

 

Version texte

Je m’étais pourtant imposé d’être spontané et de pas dépasser les quarante-cinq minutes pour écrire mes articles de blog quotidiens.

Mais non. Faut que je bosse, que je relise, que je peaufine

Que je nuance aussi parfois.

Et même après avoir posté, il m’arrive encore de corriger.

Tu peux croire que c’est de l’exigence et du perfectionnisme.

Non, ce n’est pas ça.

 

Pareil pour les commentaires. Je les lis tous.

Et ce qui m’affecte le plus, c’est quand il n’y en a pas.

 

Hein ? Quoi ? Pas de réaction ?
Mon article n’a pas touché ?
Ha… au secours

Tu peux croire que c’est parce que j’ai un grand désir de connexion avec toi.

Ce n’est pas ça non plus.

On dit souvent que ce qui permet à un blogueur, à un auteur, de passer un palier, et qui est même parfois considéré comme la marque du succès, c’est ce moment où tu commences à avoir des réactions négatives à tes articles.

Quand tu rencontres enfin tes premiers « haters ».

Et qu’enfin, tu divises, en osant affirmer quelque chose de toi, qui n’est pas conforme aux attentes des autres, qui n’est pas consensuel.

A ouvrir une brèche dans le chemin de la pensée dominante.

Je ne te parle pas de rechercher volontairement des « haters », dans une démarche opportuniste, pour créer de la polémique et te faire connaitre. Mais de réussir à  t’en foutre assez des critiques et des compliments, pour aller rencontrer l’endroit discret depuis lequel l’expression de ta vérité te sépare des autres.

Les artistes, et les enseignants qui m’ont le plus appris, sont souvent des gens qui m’ont dérangés, fait réagir, vaciller, perdre mes repères.

J’ai détesté le cinéma de Ken Loach, de Michael Haneke, et de Tarantino. Ces films m’ont mis en colère, agacés, ennuyés, mais m’ont aussi fait réfléchir en me permettant de m’y opposer, et aidés a affiner ma propre réflexion sur l’art.

J’ai aussi adoré être agacé par les films de Pialat, pester devant la lenteur d’Apichatpong Weerasetakul, ou la prétention de Tarkovski. Leur intransigeante radicalité, si elle n’a pas produit d’œuvres qui m’ont touché, m’a énormément inspiré, et encouragé sur le chemin d’un cinéma très personnel.

 

Sauf que moi, aujourd’hui, des « haters », j’en ai pas.

Et c’est logique.

Vu que je fais tout pour ne pas en avoir.

 

Ce qui guide inconsciemment mon écriture, au-delà de l’envie de transmettre, de communiquer, de questionner le monde, c’est une énorme peur.

Celle de te décevoir.

Que tu me juges, me rejettes.

Que tu t’éloignes de moi.

Je suis un dépendant affectif, caché derrière un masque d’observateur impassible.

Ironiquement, je sais bien que chercher à ne déplaire à personne, est certainement le meilleur moyen d’être oublié de tout le monde.

 

Un jour, j’arriverai à m’exposer, en assumant des idées, des croyances qui te feront bondir.

Je serai suffisamment en sécurité intérieure, et confiant dans la force de ma plume, de ma pensée, pour ne plus avoir peur de te décevoir.

J’oserai mon propre ridicule, ma pusillanimité, et ma mauvaise foi.

J’enlèverai mon costume de savoir, et mon masque de tolérance, et me torcherai le cul avec la bienveillance factice, et l’amour dégoulinant.

J’oserai te tacler, et éclater d’un rire tonitruant en t’écoutant.

Je pourrai me moquer toi, de moi, et des drames de la vie qui nous entoure.

Un jour, je choisirai de susciter ta colère plutôt que ton indifférence.

Non par plaisir de la provocation, car la provocation aussi, peut être le masque funéraire de la peur.

Juste par honnêteté.

N’est ce pas la plus belle façon d’aimer ?

Accepter que tu me rejettes, c’est juste te reconnaitre dans ton droit à la différence.

Peut-être alors que tu te désabonneras, parce que tu n’es pas le bon public pour mon blog.

Ou peut-être que tes réactions viscérales à mes écrits, toucheront un point si sensible chez toi, que tu n’auras qu’une seule envie : réagir, t’opposer, et t’affirmer, à ton tour.

Nos échanges deviendront peut-être la base de la construction d’une vraie relation.

Et de mon premier « hater », tu deviendras alors mon plus grand fan.

 

 



Prénom

Learn more about Mailchimp’s privacy practices here.


N’hésite pas à me faire part de tes réactions : tes commentaires m’aident à faire vivre ce blog. Parfois même, de nos échanges pourra naître un article.

Et soutiens moi en partageant l’article que tu as préféré dans tes réseaux.

14 réponses
  1. isabelle
    isabelle dit :

    Tu veux savoir ce qui m’a agacé ?
    ça m’a agacé de voir encore le spectre du dépendant affectif.
    « Oh non, pas lui ! » je me suis dit, tout en n’étant pas étonnée, compte-tenu des posts précédents.
    « Oh non, encore, un ! je les « attire » ou quoi !? ». De même que « les chiens ne font pas des chats » comme disait ma mère, je suis souvent touchée par les gens dont j’ai le sentiment qu’ils me ressemblent un peu.

    Donc, oui, ton texte a à nouveau résonné. Je vais rester !

    Ah si, quand même : Je déteste les gros mots :))

    Répondre
  2. Nouria
    Nouria dit :

    Peut-être qu’entre hater et fan, il y a un panel de possibles qui peut passer par des émotions aussi diverses que variées.
    Si ce que tu écris me dérange où vient me bousculer dans ma représentation du monde où mes croyances ou m’emmerde tout simplement, je ne deviendrai pas une « hater » pour autant, mais je m’engage à t’en faire part sans complaisance, sans prendre de pincettes peut-etre, mais ce sera toujours avec bienveillance.
    On peut dire va te faire foutre en toute bienveillance. 😁

    Répondre
    • Namir
      Namir dit :

      Oui, mon article est un peu simpliste, et y a des nuances. En général, les haters arrivent plutot quand t’atteins un stade de notoriété très important. J’en suis pas là !

      Répondre
  3. Emmanuel
    Emmanuel dit :

    Lorsque j’ai lu ton article, il y une heure à la terrasse ensoleillée d’un café, je me suis machinalement frotté l’aile du nez en prenant conscience de ce que tes mots faisaient en moi.
    Et là unes des palettes qui soutiennent mes lunettes s’est détachée, elle est tombée, trop usée.
    Je suis directement allé chez un opticien les faire réparer.
    Sur le chemin, je continuais à laisser diffuser ton texte.
    Une première image m’est venue sans que je sache d’où ni pourquoi:
    C’était lundi, j’étais allé prendre un café (encore) dans un des troquets du quartier quartier, lorsque je suis allé aux toilettes ( normal, avec tous ces cafés) et là je fais face à mon reflet dans le miroir au dessus du lavabo.
    Sur le miroir, en haut, était écrit en bleu :
    « La beauté est dans les yeux de celui qui regarde »
    Ça m’a fait sourire… Et réfléchir aussi (si j’ose dire)
    En repensant à ton article et à cette image, je me suis souvenu des moments terribles de solitude et de non sens où l’on ne peut se raccrocher à rien ni a personne pour nous renvoyer notre réalité.
    Ces silences insupportables, insondables de l’être aimé, de l’autre qui nous laisse totalement seul au milieu de nulle part.
    Et puis une autre image, celle d’un film je crois:
    Un motard montrait ses points fermés sur lesquels étaient tatoués des lettres sur chacune des phalanges :
    H.A.T.E. sur les doigts du poing droit et L.O.V.E. sur l’autre.
    Et puis la gentille opticienne m’a rendu mes lunettes, elle avait changé les deux plaquettes, gratuitement en plus !
    Sans trop savoir pourquoi j’ai décidé de te poster cette petite histoire inspirée de ton écrit.
    Bonne journée à toi.

    Répondre

Trackbacks (rétroliens) & Pingbacks

  1. […] Je déteste le cinéma de Tarantino, et j’avoue avoir du mal à comprendre l’engouement qu’il suscite. Scorcese me dérange profondément avec ses personnages qui tuent comme on allume une cigarette. L’esthétisation du flingue, et de l’hémoglobine, j’adhère pas du tout. Pourtant, je continue à regarder leurs films. Ils me font réfléchir sur pourquoi je déteste cela, sur le rôle de l’art, sur les raisons pour lesquelles les gens aiment cela, et ce qui fait que leurs films touchent les gens. Je te conseille à ce sujet cet autre article que j’ai écrit. […]

  2. […] Je déteste le cinéma de Tarantino, et j’avoue avoir du mal à comprendre l’engouement qu’il suscite. Scorcese me dérange profondément avec ses personnages qui tuent comme on allume une cigarette. L’esthétisation du flingue, et de l’hémoglobine, j’adhère pas du tout. Pourtant, je continue à regarder leurs films. Ils me font réfléchir sur pourquoi je déteste cela, sur le rôle de l’art, sur les raisons pour lesquelles les gens aiment cela, et ce qui fait que leurs films touchent les gens. Je te conseille à ce sujet cet autre article que j’ai écrit. […]

Répondre

Se joindre à la discussion ?
Vous êtes libre de contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *