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L’égyptien libéré, c’est Ayman, un de mes supers potes. Après son arrivée en France, il a été été le sujet d’une émission dans laquelle, il racontait sa vie sexuelle à Inès Leraud, intitulé l’égyptien libéré : tu peux découvrir le podcast sur Arte Radio. Je te mets le lien ici.

 

Ayman a grandi dans un milieu pauvre, et vécu à Alexandrie et dans la campagne égyptienne,  dans des univers de promiscuité, de violence et d’agressions sexuelles. Un univers où la notion de consentement n’existe pas, où les hommes abusent des femmes, et où les femmes aussi abusent des enfants et des adolescents.

 

 

Ayman, quand il raconte cela, ça le fait marrer. Pour lui, c’était drôle, c’était son quotidien. Quand la violence est partout autour de toi, tu finis par penser que c’est normal. Et tu minimises toute souffrance, pour te concentrer sur ce qui te donne du plaisir. Pas consentant, mais content.

Quand j’ai ré-écouté ce podcast récemment, il m’a beaucoup questionné sur la société égyptienne, sur les capacités de résilience de l’humain, sur l’origine de la violence. Il m’a beaucoup fait réfléchir aussi sur les différences de repères, de perceptions et de définitions entre l’occident et l’orient.

Ce qui est normal là, ne l’est pas ici. Et inversement.

Et comment, chercher à comprendre l’orient, le monde arabe, l’Égypte à travers les filtres de l’occident, induit forcément des erreurs de jugement et des interprétations. On pourrait par exemple s’interroger, si tu écoutes le podcast, sur le choix du titre, de la musique, et de l’habillage qui connotent et orientent la compréhension de l’émission.

Je ne crois pas que l’expérience d’Ayman peut-être généralisée à toute la société égyptienne. Disons que je ne préfère pas le croire. L’Égypte que j’ai connue me parait différente. Mais je n’y ai pas fréquenté les mêmes milieux, et son témoignage montre toutefois qu’il est loin d’être un cas isolé.

Dès l’adolescence, Ayman a eu une sexualité très ouverte, couchant tantôt avec des filles, tantôt avec des garçons. Pour lui, comme pour ses amis garçons, c’était simple : ils aimaient les filles. Mais quand les filles n’étaient pas disponibles, ou accessibles, et bien ils jouaient entre garçons à se donner du plaisir. Sans jamais se poser la question de leur appartenance, ou de leurs orientations sexuelles.

Ayman, me dit qu’il n’a jamais eu autant de liberté sexuelle qu’en Égypte. L’interdit là-bas ne se trouve pas dans l’acte et le faire, mais plutôt dans la nominalisation.

– Sexuellement, il y a plein de choses que tu peux faire en Égypte et beaucoup plus facilement qu’en France. Mais le dire, c’est autre chose.

C’est en arrivant en France, que des gens lui ont demandé : 

– Comment tu te définis : Es tu Homo ? Hétéro ? Bisexuel ?

Ces mots-là ne faisaient pas partie de son vocabulaire. Et là, il se retrouvait à devoir se positionner. Et il a vécu cela comme une limitation.

Au fond, est-ce si important ?

Moi, qui jusque là, ait toujours recherché la clarté, et ressenti le besoin d’appeler un chat un chat, pour comprendre précisément le monde, et savoir de quoi on parle, je réalise à quel point pour Ayman, laisser les choses en suspens, ne pas les nommer peut aussi être un mode de vie, qui au delà de sa personne, est peut-être même caractéristique d’un pays, ou d’une culture dans laquelle la paix sociale repose sur la préservation des apparences, les non-dits, et le respect des traditions. Les mots peuvent être dangereux.

J’en viens à me demander si, en voulant mettre des étiquettes sur nos préférences, en voulant nommer et classifier notre sexualité en terme d’appartenance ou d’orientations, nous ne sommes pas en train de l’enfermer. Est ce que la réalité n’est pas souvent plus variée, plus subtile, plus riche que les mots dans lesquels on l’enferme ?

Finalement notre langage, est-il un outil de libération ou d’aliénation ? Les mots ne deviendraient-ils pas notre prison, dès que l’on cherche à se définir à travers eux ?

J’ai tendance à croire que mettre un mot sur un objet, un acte, une sensation, une émotion, c’est libérateur. C’est même un des axes de l’accompagnement thérapeutique.

Avec mes clients, je leur demande systématiquement ce qu’ils ressentent. Souvent certains répondent : je ne sais pas. Alors, je les invite à prendre le temps, à chercher, à préciser, jusqu’à réussir à nommer l’ensemble de mouvements, des sensations et des émotions qu’ils vivent. Et quand ils arrivent enfin à nommer leur état interne, c’est souvent soulageant.

C’est d’ailleurs aussi un des axes de reconstruction et de désensibilisation émotionnelle, pour les personnes qui ont vécu des traumatismes : réapprendre à nommer précisément ce qui s’est passé, et à le remettre en chronologie, pour sortir de l’état de sidération et d’aphasie qui les touche parfois.

Mais parfois, le langage et les mots ont une charge et une connotation si forte, qu’ils peuvent influencer et transformer la perception même de l’expérience vécue. Ainsi, lorsqu’Ayman est en relation avec ses amis garçons, est-il juste pour lui d’appeler cela relations homosexuelles, alors que ce qu’il vit ce sont des jeux (interdits) entre potes ?

En Égypte la question serait vite répondue : C’est bien plus choquant et plus dangereux de se revendiquer gay ou homosexuel, que d’avoir des relations sexuelles entre hommes.

Cela me fait penser à l’un des préceptes de l’Advaita Vedanta dont je parle dans cet article (la boucle hypnotique)

Tout ce que tu crois être, tu ne l’es pas.

Et c’est peut-être lorsque les mots viennent définir notre identité, c’est à dire tout ce que tu peux rajouter derrière une phrase comme

Je suis…..

que finalement ils nous éloignent de notre vérité.

Dans un des cercles d’écriture que j’organise, j’étais parti d’une phrase aussi simple que “Je suis un homme” et j’avais commencé à la questionner. Est-ce vrai ? Comment je le sais ? Qu’est ce qui me définit en tant qu’homme ? Le langage ? Mes organes génitaux ? Le rôle dans lequel on m’a placé ?

Mais si je ferme les yeux un instant, et que j’oublie mon assignation, et mon histoire, et que je me concentre seulement sur mon état interne, comment je le sais que je suis un homme ? D’ailleurs, le suis-je ?

L’expérience a été perturbante. Elle a ouvert la porte à un espace infini de possibilité, et de perceptions, dans lesquelles une phrase aussi simple que “je suis un homme” n’avait plus aucun sens.

Tout ce que tu crois être, tu ne l’es pas.

Dans un des épisodes du podcast, Ayman raconte que vers l’âge de 8 ans, il s’est laissé entrainer par un pédophile, qui a essayé de l’embrasser. Réussissant à s’enfuir, il s’est réfugié chez son oncle, à qui il a raconté tout ce qui lui était arrivé.

Apprenant cela, l’oncle d’Ayman lui a donné une raclée magistrale, comme si c’était lui le fautif. Et Ayman en a tiré une leçon : ne rien raconter aux adultes. C’est même peut-être plus dangereux qu’autre chose.

Nommer les choses, n’est pas toujours libérateur. Parfois, c’est se taire qui permet de s’en sortir.

Bon, je suis quand même bien content qu’il ait pu, des années plus tard, témoigner de son expérience, dans l’égyptien libéré.

Et toi alors, comment tout cela résonne chez toi ?

Je serai curieux d’avoir ton avis sur le podcast d’Ayman.

N’hésite pas à partager cela dans les commentaires.

 

 

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Aout 1941. Mes grands parents maternels préparent leur mariage dans le village de Om Doma, en Égypte.

Là-bas, les mariages arrangés sont coutume.

Ma grand-mère, Victoria, n’est absolument pas consentante pour épouser Saïd.
Elle en fait part au prêtre, qui l’écoute attentivement. Puis précipite la cérémonie pour ne pas donner à ma grande-mère l’occasion de fuir le village pour éviter le mariage.

Said est le fils d’Oweda, le Omdeh (maire) du village d’Om Doma. Mais autant Oweda, mon arrière grand-père est influent et respecté, autant son fils, Saïd, est impulsif, illettré et peu sociable.

C’est sans doute pour calmer sa fougue, et ses ardeurs de chien fou, qu’Oweda lui a trouvé une épouse docile.

De ce mariage non consenti naitront 5 enfants, conçus dans la violence et la brutalité.

Dont ma mère, qui verra le jour le 1er Avril 1944.

 

 

Dans la maison familiale, ma mère, encore enfant au milieu des annees 50, dormait par terre, avec son frère, et ses sœurs, aux cotés de ses parents.

Parfois, elle était brusquement réveillée en plein milieu de la nuit, par des pluies de coups de bâtons.

C’était son père, Saïd, tellement en colère que Victoria se soit encore refusée à ses assauts, qu’il la battait, et n’hésitait pas à taper sur tout ce qui trainait autour de lui.

A commencer par ses enfants.

Ma mère n’a jamais aimé son père. Et s’est sentie très tôt la mission de protéger sa maman, a qui elle reprochait en même temps, énormément sa tolérance à la douleur, et son absence de révolte.

Alors, ma mère a décidé de porter cette colère que sa mère n’exprimait pas. Une colère contre cet homme qu’elle a vu trop de fois frapper et abuser de son épouse, colère qui s’est ensuite généralisée à tous les hommes désirants. Et qui a entraîné chez ma mère un dégout de la sexualité.

Devenue adulte, elle a eu beaucoup de prétendants au mariage, et les a tous repoussés. A 29 ans, elle a fini par accepter la demande de mon père. Peut-être pour céder à la pression sociale. Peut-être pour éviter de finir vieille fille. Ou pour d’autres raisons. Je ne saurai jamais.

Quand j’étais enfant, tous les étés, je me rendais au village, souvent sans mes parents.

Mon grand-père Saïd m’accueillait en souriant. Et chaque fois que je repartais, il fondait en larmes, comme un bébé, triste de me voir partir.

Je l’aimais bien. C’était un homme simple, un peu soupe au lait à qui j’adorais faire des blagues. Comme lui piquer son bonnet pendant son sommeil, et repeindre son crane chauve d’un mélange de talc et de farine.

Ou encore lui mettre cinq cuillères de sel dans son thé pour le plaisir de le voir cracher, hurler et maudire la terre entière.

Il était sans doute trop vieux pour me courir après.

Il m’a jamais fait peur mon grand-père. Je me sentais même proche de lui. Je le voyais comme un enfant illettré, mal-aimé, que ses parents n’avaient jamais valorisé, et qui préférait la présence des bêtes à celles des humains.

J’ignorais pourquoi ma mère le méprisait autant Ce n’est qu’après sa mort, en 1998, que ma mère m’a raconté son histoire.

Pour elle, Saïd n’était même pas un homme.

Au mieux un simple d’esprit, au pire un animal.

Je crois bien que cette phrase « même pas un homme » est restée gravée dans mon esprit, et a du constituer un frein puissant, lorsque j’ai senti les premiers élans puissants du désir irriguer mon bas-ventre.

Je n’étais pas sur de vouloir devenir un homme, si le coût était de perdre l’amour de ma mère.

Et puis, comment comprendre ce désir naissant, qui se manifestait si peu chez mes parents. Mon père, intellectuel concentré sur son travail, semblait tellement au dessus des besoins physiques et matériels, que j’avais l’impression que mes premiers troubles érotiques faisaient de moi quelqu’un de pervers, et d’anormal.

J’ai vainement lutté contre mes désirs, et ma sexualité. Et plus j’essayais de les réprimer, plus ils devenaient une obsession honteuse, que je vivais en secret.

Aujourd’hui encore, je ne suis pas au clair avec mes désirs, ayant encore du mal à distinguer entre l’agressivité liée à la honte et au rejet de ma sexualité, et l’agressivité comme expression de l’énergie et du désir de vie

La sexualité n’était pas la bienvenue dans notre famille.

Je me souviens encore du jour où ma sœur, revenant de colonie de vacances, est allée discrètement planquer son linge sale dans le bac. Ma mère, apercevant une culotte tachée de sang a eu un soupir de désespoir.

 – Ça y est, tu les as eues ?

Ma sœur honteuse a acquiescé

– Oh la la, , ça y est, les problèmes vont commencer.

Un de mes amis m’a raconté l’histoire d’un père qui un jour, lorsqu’il a appris que sa fille avait eu ses règles, l’avait invitée au restaurant, pour célébrer l’entrée dans le monde de la féminité.
Oh, comme j’aurais trouvé cela beau, un rituel comme ça, pour célébrer, l’entrée dans le monde des jeunes hommes.

Que mon père, ou mieux encore, ma mère me dise :

– Bravo mon fils, tu viens de réaliser ta première branlette, tu as réussi à éjaculer sur le polochon, allez, viens on va fêter ça.

 Un jour, lors d’une séance d’étiotherapie, la thérapeute, a qui je n’avais rien raconté de notre histoire familiale, m’avait dit cette phrase étrange :

– Namir, tu n’est pas ton grand-père. Il est temps que tu te détaches de lui. Arrête de chercher à la protéger.

Je n’avais alors pas compris grand-chose à ses propos. Ce n’est que récemment que j’ai perçu à quel point Saïd avait eu une influence sur la vie de ma mère et sur la ma manière dont je suis devenu homme.

En écrivant ces lignes, je réalise en frissonnant, que Saïd, c’est aussi le deuxième prénom que j’ai donné à mon fils.

Certains disent que nous venons sur terre pour réparer les fautes de nos ancêtres.

Alors, chère maman, ne m’en veux pas trop de divulguer cette histoire, toi qui m’avais fait promettre de la garder secrète.

Je resterai ton fils désobéissant.

Je crois qu’écrire est peut-être mon moyen de libérer nos fantômes pour les aider à retrouver leur places parmi les esprits, pour que nous et nos enfants puissions enfin retrouver notre place parmi les hommes et les femmes

 

 

 





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Chaque semaine,  je donne la parole à des collègues, amis, hommes et femmes qui se racontent courageusement dans leur rapport à l’intime, au désir, à la sexualité, au regard de l’autre, à la honte, à la culpabilité. Qu’est ce qui les a fait évoluer, ce qu’il/elles ont réussi à dépasser, ou  avec quoi chacun bataille encore sur ce sujet qui nous appartient tous. Voici le témoignage d’Ulysse, 55 ans.

Pour moi l’amour est à la fois un mystère et un Graal, au sens de la coupe féminine originelle : désirable et inatteignable. Mais c’est aussi ma raison de vivre et d’être au monde.
Je le perçois comme un état passager : il y a des moments d’amour, et d’autres sans.
D’où ma quête. Et ma souffrance, inséparables.

L’Amour est un état énergétique, divin, à la fois impermanent et éternel, que je sens, que je laisse passer en moi, et qui contribue à ma réalisation humaine : être éveillé à l’amour, c’est être au-delà des croyances et de l’égo. Même si cela aussi est une croyance… évidemment.

Je suis un homme hétéro, je n’aime pas trop les classifications, je sais surtout que j’aime la présence des femmes, leur insondable immensité, leur fascinante et effrayante beauté.
Je me suis souviens questionné sur leur manière d’être en rapport au monde. J’aime aimer et être aimé, comme beaucoup, mais par elles surtout.

Et puis, elles m’ont fait peur aussi. Nombre de fois, j’ai eu peur. Peur de leur amour bien plus encore que de leur absence d’amour.

 

Quand j’étais adolescent, je faisais des rêves de castration : des flashs où mon prépuce était sectionné d’un seul coup, j’en étais tétanisé. Je me demandais d’où venaient ces images si étranges, qui ont peut-être séparé les femmes des hommes, créant ainsi leur revanche sourde : elles ont fait de nous des êtres incapables d’enfantement. De simples géniteurs mortels et puérils.

A 7 ans, je désirais autant les approcher que je redoutais ce moment qui me rendait si vulnérable. Je rougissais instantanément, comme un plaisir tellement déstabilisant. J’apprenais à oser.

A 14 ans, j’ai eu peur de ne pas savoir bien embrasser ma copine Annabelle. Je me comparais, mes attentes étaient déjà conditionnées par ce putain de besoin d’être à la hauteur. Mais de quoi ? De qui ?

Et puis, je me suis vite demandé : c’est quoi être un homme ?

A 16 ans, j’avais peur de ne pas être un homme bandant, adulé, performant. Peur de dire tout ce que je ne connaissais pas des mystères du sexe et des filles.

Plus tard, j’avais peur de ne pas être assez doux, ou de l’être trop. Pas assez homme, viril quoi… quelle drôle d’idée.

Qu’est-ce que tu fous là papa ?

Mon Papa, faux macho avec beaucoup d’humour, et ses élans de mains aux fesses à ma mère en public. Et ma mère qui ne se plaignait pas, on aurait dit que cela lui plaisait aussi.  Elle rougissait en disant « Rhhôô arrête », mais elle souriait. Je regardais cela d’un œil critique avec beaucoup d’empathie pour elle. Je n’avais alors aucune idée du mot consentement.

Un jour vers 20 ans, j’ai passé une soirée avec une copine exaltante, mais tellement entreprenante… je n’étais pas prêt, ni émotionnellement, ni « amoureusement », ni physiquement. Elle m’a littéralement sauté dessus, son parfum était trop fort, son rouge à lèvres trop rouge et collant, son désir gênant, ses mots provocants… j’ai cru qu’elle allait me baiser bien au-delà de mes accords intérieurs… J’ai flippé et je suis parti.

Ça ressemblait à un début de viol, je ne l’ai réalisé que bien plus tard.

J’ai même connu une fille qui m’a harcelé chez moi, avec beaucoup de violence. Simplement parce que je ne l’aimais pas autant qu’elle, disait-elle.  Elle me voulait. La leçon a été longue a digérer… qui suis-je en tant qu’homme dans un moment pareil ? Comment me positionner sans trahir mes valeurs ? Comment accepter d’être rejeté ?

Plus tard encore… découvrir le sexe dans d’autres contextes culturels, où la femme aime être dominée ou même se faire payer, alors que je n’ai jamais toléré la soumission ni la prostitution… jusqu’où accepter… et au nom de quoi, de qui ?

Me laisser approcher par des hommes désirants, alors que je ne savais pas quoi faire avec l’homosexualité… savoir leur dire non parce que je ne les désirais pas, mais qu’ils me permettaient de me poser ce genre de questions… quelle est mon orientation sexuelle réelle ? D’où vient-elle et comment a-t-elle été conditionnée ?

Rencontrer le bondage, et briser mes a prioris sur le sado-masochisme, me rendre compte qu’un fantasme peut être respecté tant qu’il est éthique et dans le consentement pour chacun, sans danger, juste pour stimuler le désir et découvrir son corps autrement. Ses limites, les frontières du plaisir.

Que sais-je de mon désir, de ce qui m’excite ?

Qu’est-ce qui est normal ou pas ?

Alors j’apprends. Je dénoue les cordes de mes croyances.

Plus tard encore… accepter l’abstinence parfois, par respect pour ma partenaire qui peut parfois souffrir physiologiquement, et toutes les valeurs et pulsions qui sont mises à nu… Encore une fois, j’ai appris par le questionnement né de mes émotions. Déstabilisantes.

Me réconcilier avec le porno, apprendre à faire des choix de visionnage en fonction de mes besoins, sans en avoir honte, pouvoir en parler, même à ma partenaire ou à mes amis. Dédramatiser.

Et puis même… penser à ce que sera ma sexualité de vieux, celle que j’aurai à 80 ans ou plus, pour être encore plus libre, et ne rien regretter !

Avec la maturité, la parentalité, mes expériences solo qui se sont adoucies, celles de la fidélité, et les expériences extra-conjugales, j’ai moins peur de l’amour ou des femmes.

Peut-être parce que je crois mieux connaître mon corps, ce que je désire profondément, selon les moments. Je connais mieux mes besoins, ma place, et que l’homme que je deviens sait s’asseoir en lui, un peu, pour ne pas faire déborder cet amour, ni le réclamer à corps et à cris. J’accepte de mieux en mieux mon humanité, mon animalité, mes fantasmes et ma masculinité, j’ai moins peur d’aimer.

Et je rencontre de nouvelles peurs aussi : celles d’être indésirable, ou pire, de finir seul.

Avec un peu plus d’amour pour moi-même. Et ça fait du bien, vraiment.

Ulysse.

 



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J160 - Le droit à la détresse

« Quoi ? vous vous séparez, mais comment est ce possible ? Je n’arrive pas à y croire… On vous a toujours vus comme un couple modèle. »   C’est fou cette tendance que l’on a à idéaliser la vie des autres. A…

J159 - Te montrer vraiment

J’ai peur de déplaire. C’est une des propositions sur lesquelles nous avons écrit lors du précédent cercle. Commencer ton texte par cette phrase, et partir ensuite pour 10 minutes de flow ininterrompu, ça te fait partir…

J158 - T'es con, ou tu le fais exprès ?

- Mais enfin, t’es idiot ou tu le fais exprès ? J’ai 12 ans. Et Mme Burchill, ma prof de biologie nous emmène en forêt observer la nature, nous donnant comme devoir de la décrire. J'aperçois une araignée dont…

 

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Dans cette nouvelle rubrique de mon blog, je donne la parole à des collègues, amis, hommes et femmes courageu(x)ses qui se racontent dans leur rapport à l’intime, au désir, à la sexualité, au regard de l’autre, à la honte, la culpabilité. Ou ils et elles en sont aujourd’hui, et comment elles ont évolué, ce qu’elles ont réussi à dépasser, ou avec quoi elles bataillent encore sur ce sujet qui nous appartient tous.

Voici donc le premier témoignage, celui de Raphaël, hypnothérapeute. 

A l’époque, j’étais le gars qui faisait tout pour rendre sa partenaire heureuse, et être perçu comme le gentil gars infaillible sur qui on peut compter.

Le problème venait de ce que j’avais mis sur le mot « gentil ».

Par exemple, je m’interdisais de traiter ma partenaire comme un objets lors de mes rapports sexuels, ou d’avoir des fantasmes considérés comme « pervers ». Il ne devait rien y avoir  de dégueulasse en moi, ni de pensées sexuelles bizarres.

Bref, je faisais tout pour que ma partenaire de l’époque ne me quitte pas, ce qui fait que ma sexualité à longtemps été collée à sa vision sexuelle.

J’avais alors intégré qu’il y avait 2 camps :

1- Les gentils qui font du « bon sexe » et sont donc respectueux.

2- Les méchants connards qui adorent les plans culs quand ils sont célibataires, matent du porno même en couple, et ont des envies particulières (trash talk, domination forte, etc)

A l’époque je me masturbais en privé sur des pornos, et je fantasmais sur la domination et des trucs que ma partenaire qualifiait de « déviant, pervers, connard ». Ma sexualité de couple à ce moment là était en totale contradiction avec ce qui m’excitait, et je ne pouvais pas dire « voilà ce que j’aime ! » car je savais que si je le faisais, je me retrouverais dans la catégorie des baiseurs, pervers, et je perdais la relation.

 

 

J’étais dans un dilemme interne entre mes envies, ma propre sexualité quand je suis seul, et le masque de l’homme sympa qui répondait à la vision du monde et de la sexualité de ma partenaire, pour recevoir son amour.

Cette première relation était quasi asexuée, je ne prenais presque pas de plaisir à faire l’amour, enfermé dans mon image du bon gars.

Avec mes amis également, c’était un peu tabou de parler sexualité. Faut dire qu’on était tous au début de la vingtaine.

Après 6 ans de couple, je me suis retrouvé célibataire. Et les choses ont commencé à évoluer.

Il a fallu que je réapprenne à me connaître.

J’avais tellement internalisé la façon de penser de mon ex, que même 5 mois après la rupture, je ne me donnais pas le droit d’avoir un coup d’un soir avec quelqu’un.
Pour mon ex, les gars qui faisaient ça étaient des connards, pas fiables. Il n’y avait pas d’autre perspective.

Le premier déclic a eu lieu chez une amie thérapeute. Je lui avais parlé de mon envie d’avoir des relations sexuelles d’un soir, et de ma peur d’être un connard qui générait un blocage.

Elle m’a demandé à qui appartenait cette idée que ça faisait de moi un connard d’avoir envie d’un plan cul ?

Les choses ont commencé à évoluer.

Au bout de quelques mois. J’ai pu m’autoriser à avoir des plans cul, et accepter que ça ne faisait pas de moi un mauvais gars. J’étais juste un gars qui avait envie de partager des moments sexuels avec des femmes qui recherchaient la même chose.

Et franchement je crois que je ne pouvais pas tomber mieux.

Pour quelqu’un comme moi, qui n’avait connu qu’une seule relation (et dépendante par dessus), et qui se retrouvait en plein célibat, perdu, et bloqué dans ses croyances, et bien les plans cul, c’est formateur.

Mon premier plan cul, à clairement été une thérapie sexuelle. J’ai pu réaliser la plupart de mes fantasmes avec une femme qui avait quasi 10 ans de plus que moi, et elle adorait être soumise. Domination, trashtalk, sodomie, le faire 6 fois dans une journée, dans toutes les pièces de l’appartement. Je crois que j’ai essayé toutes les positions de la planète. Je me découvrais dans ma sexualité, et elle me confortait que : tranquille j’ai le droit d’avoir ces envies là, et que c’est juste le feu quand ça match avec la personne en face.

Donc tout de suite ça m’a détendu, je n’étais pas là pour créer un couple, ou être aimé.

J’ai aussi eu la chance de tomber sur des partenaires qui s’en foutaient de la performance. Parfois j’avais des pannes car j’étais stressé de bien faire. Pas grave, on prenait une pause on discutait et on reprenait plus tard !

Et c’était vachement cool.

Le plus important en fin de compte, c’est pas d’avoir rencontré quelqu’un avec qui ça matchait niveau sexualité, c’est d’avoir croisé plusieurs personnes complètement différentes, juste pour du sexe, qui m’ont fait comprendre que chacun a ses propres désirs, envies, fantasmes, habitudes, et que quand c’est complètement assumé c’est génial.

 

Au fur et à mesure j’ai commencé à comprendre que ce qu’on aime dans la sexualité n’est qu’une histoire de communication et de compatibilité avec la personne rencontrée.

Ça n’a rien à voir avec le fait d’être un gentil bon gars, ou un connard pervers.

Tu peux être un connard pervers juste en faisant des blagues de cul avec ta partenaire, et être un gentil en faisant les mêmes blagues avec une autre.

Il y a des personnes pour qui, dire en plein milieu d’un tête-à-tête au restau « j’ai envie te prendre fortement dans un coin maintenant » est perçu comme être obsédé et pervers, et d’autres pour qui c’est trop cool et excitant.

C’est qu’une histoire de vision des choses et de compatibilité.

 

Avec le recul, j’ai compris ce qui bloquait avec ma précédente relation, en plus de ma dépendance, c’est qu’on était totalement incompatibles sur notre vision de la sexualité (et les jugements rajoutés par dessus) et ça nous rendait malheureux.

Au bout d’un an, j’ai commencé à assumer auprès de mes amis d’être un célibataire qui aime beaucoup le sexe. Ça a créé une ouverture sur ce sujet entre nous.
Du jour au lendemain, lors d’une soirée, on s’est mis à raconter nos expériences en solo, ou avec nos différents partenaires, dans les détails :

– Elle était trop bonne ! Ouais j’ai dis « bonne » et alors ?  Qu’est ce que tu penses de moi ? Que je suis irrespectueux de la femme ?
Non car j’ai appris aussi que les jeux sexuels et nos pensées n’ont rien à voir avec le respect qu’on a pour une personne.

 

L’irrespect intervient quand il n’y a plus de consentement dans une relation.

Et il y a une différence entre consentement et vision sexuelle.

J’ai eu des partenaires qui me demandaient de leur dire qu’elles étaient bonnes, qu’elles suçaient trop bien, ou qu’elles étaient des salopes, et j’adorais ça également. On était consentants.

Même si le thérapeute en moi avait conscience que derrière chaque mot, chaque demande, il y avait une raison, une histoire qui en disait sur les fonctionnements de la personne, bah en fait j’étais pareil. J’étais pas là pour être parfait et pour qu’on ait tous la même sexualité complètement lissée.

 

On a discuté de tout cela avec mes amis , et amies également !

 

Vous n’avez aucune idée à quel point, entendre des femmes parler de cul ouvertement entre elles, et dire « j’ai adoré baiser avec lui » « j’ai trop envie de faire une gorge profonde », et qui sont okay avec le fait de nous entendre dire « elle est trop bonne », c’est dédramatisant.

Ça a crée une ambiance

– Relax tranquille. Au fond on parle pareil, on a tous notre propre sexualité.

Bref on a discuté de nos expériences, de ce qui nous excitait le plus, les pratiques qu’on préférait, ce qu’on aimait regarder comme porno, les actrices qu’on aimait bien, au point même de partager le genre de porno qu’on matait, porno lesbien, à plusieurs, exhibition, différence d’âge etc.

Ces discussions intimes avec mes meilleurs amis, que je connais depuis mon enfance, m’ont énormément fait évoluer sur l’acceptation de mes désirs et préférences sexuelles.

Et ça ne fait pas de moi un gars mauvais.

Juste un gars qui aime le sexe et qui a ses propres préférences.

Cette évolution ne s’est pas faite en un jour, elle s’est produite sur une période de 2 ans environ. Le fait de baigner de plus en plus dans l’accompagnement m’a beaucoup aidé également.

Par la suite je me suis remis en couple pendant un an, je crois que j’ai eu les meilleures relations sexuelles de ma vie, tellement on était compatibles sur ce qu’on aimait.

Je suis tellement allé loin avec ma partenaire. Elle me disait de faire entièrement ce que je voulais, domination totale, et aussi des idées un peu plus fantaisistes.

Je suis aussi tombé sur des femmes qui m’ont exprimé leur envie d’être étranglées, recevoir des gifles et se faire fouetter avec une ceinture.

 

Je me suis demandé si j’étais quelqu’un de déviant sexuellement. Mais déviant par rapport à qui, à quoi ?

On est probablement tous le déviant de quelqu’un.

 

Comme j’ai eu la chance de rencontrer différentes partenaires, et d’avoir tellement discuté avec mes amis, j’ai arrêté de penser la sexualité des gens en termes de bon/mauvais, déviant/normal.

Il y a juste des pratiques/préférences qui MOI me font plaisir et fantasmer, et d’autres que j’aime moins, voire me dégoûtent, et tranquille tout va bien.

Tout le monde y trouve son compte.

 

 

 



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