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Le dernier cercle d’écriture a été absolument magique.

Et je crois en savoir la cause.

C’est moi.

Je dis pas ça pour me lancer des fleurs C’est juste que j’ai eu la chance de démarrer le cercle avec un gros problème.

On commence chaque cercle par un tour dans lequel chaque participant exprime, en trois mots, son état interne, c’est-à-dire ce qu’il/elle ressent, et l’énergie dans laquelle il/elle, se trouve. Que ce soit de l’excitation ou de la tristesse, de la rage ou de la joie, de la fatigue, tout est bienvenu.

Enfin, presque tout.

En tant qu’initiateur du cercle, je me suis proposé d’ouvrir le bal.

Je commence.  Alors, en ce moment, je ressens….

J’ai pris quelques secondes. Et c’est là, ou le problème a commencé.

Je ne ressentais rien.

Impossible d’accéder à une quelconque sensation, ni émotion.

Rien.

Les secondes ont commencé à défiler, de plus en plus longues.

J’avais conscience des participants qui m’attendaient silencieusement.

Et je ne ressentais rien.

Alors, la peur est venue.

Pas la peur que tu ressens, non l’autre. Celle qui se cache derrière “vite, il faut que je parle, que je dise quelque chose ». Tu sais, cette peur qui a horreur du silence, et qui trouve la présence muette des autres, insoutenable. Cette peur du gars qui veut pas déranger, prendre trop de place, ni dire devant le groupe :

– Attendez. Il me faut du temps. Là, je ne sais pas encore ce que je ressens

Au risque de perdre tout statut et toute crédibilité.

Ma bouche a voulu baragouiner quelque mots maladroits.

Et là, une voix apaisante s’est faite entendre :

– Non, Namir. Prends ton temps, retournes-y

Je suis retourné pour quelques secondes supplémentaire à l’écoute. Toujours rien, à part le stress de pas réussir à ressentir quoi que ce soi.

Cette fois, c’est un autre dialogue intérieur qui s’est exprimé :

– C’est toi, le maître de cérémonie de ce cercle. Le MC. Faut que t’assures. T’as pas le droit de pas savoir. Vite, tu dois dire quelque chose. Même faux. Mais dis un truc !

Mais non. Je ne suis pas le MC justement. Je ne suis pas venu pour être le Maitre de Cérémonie.

Tiens, c’est marrant,  MC (prononcer Em SI ) ça fait comme Messih, mon nom de famille. 

Abdel Messih en arabe signifie : serviteur du Messie.

Et ben aujourd’hui, je serai le serviteur du MC.

Je suis pas le maître. Je suis le serviteur.

Mon propre serviteur.

L’élève de mes élèves.

J’ai le droit de pas savoir. De prendre le temps. C’est justement ça que je viens chercher ici

Alors, malgré la peur du vide, du silence, et du néant, j’ai continué à attendre pendant de loooongues secondes, enveloppé par cette absence de sensations intérieures, jusqu’à ce que quelque chose commence à se relâcher dans mes tensions musculaires.

Et j’ai pu enfin ressentir cette fichue peur qui se planquait sous le voile de “je ne sens rien”.

Il y a quelques temps, j’aurais été incapable de cela. Écouter le silence. Prendre mon temps. Faire attendre les autres.

L’idée même de retarder le groupe m’aurait rendu fou.

Je suis convaincu que ce qui a rendu cela possible, c’est ma pratique quotidienne de l’écriture de ce blog.

Ces efforts quotidiens, pour m’exposer de manière progressive à l’inconfort, portent leurs fruits. Ils ont fait baisser mon niveau d’insécurité, jusqu’à rendre tolérable, l’intolérable.

Voilà ce qui se passe quand le maitre disparaît.

Ce qui est puissant dans les cercles, c’est qu’il suffit qu’un seul de nous traverse un changement, pour que cette magie contamine tout le groupe.

Et nous avons tous été magiques ce soir là.

Certains textes nous ont donné des frissons. Et certaines histoires se répondaient entre elles si étrangement, qu’on aurait pu croire que les participants s’étaient concertés en amont.

Pour moi, cela a commencé par accepter le silence, ralentir, et prendre le temps.

Alors, toi aussi, j’aimerais te dire que ce que tu vis comme un problème en ce moment, contient en germe, tous les ingrédients de ta réussite.

Il est comme la peau qui enveloppe le fruit qui pousse.

Alors, délicatement, enlève la peau.

Laisse grandir l’élève. Et le maître disparaîtra.

 

 



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6 réponses
  1. lili
    lili dit :

    Un jour, un formateur est venu s’accroupir à mes pieds pour me parler. Il n’a jamais été aussi grand à mes yeux que ce jour-là.
    Quand le maître se met au service de l’élève, il l’élève…

    Répondre
  2. Quintin
    Quintin dit :

    Bonjour Namir, le silence est souvent gênant, c’est un peu comme quand on regarde quelqu’un longtemps dans les yeux, il y a quelque chose d’intime là-dedans. Je comprends que tu as dû vivre un grand moment de solitude. Et je trouve ça super que tu aies pu transformer ça en quelque chose de positif. Cela me fait penser aux premières séances que j’ai faites dans mon cabinet où je me sentais aussi comme le Maître de cérémonie investi d’une obligation de résultats. J’étais tellement stressée que j’avais du mal à être en synchro avec mes clients, jusqu’au jour où j’ai lâché cette obligation de résultat pour une obligation de moyens. A partir de là, tout est devenu plus limpide. Merci pour partager ces moments où tu t’autorises à parler de tes doutes et de ce que certains pourraient considérer comme des « faiblesse », ça nous fait du bien parce qu’on vit tous des moments comme ça. Le doute fait partie de ma vie et c’est ce qui me permet d’avancer, entraine ma curiosité et mon besoin de connaissance. Parfois il me déstabilise mais souvent il me booste. Merci pour ton honnêteté et ton courage d’assumer qui tu es.

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  3. Nathalie
    Nathalie dit :

    L’oeuf des problèmes

    Et cette question qui revient tout le temps : Comment naissent nos problèmes ? Qu’est-ce qui fait qu’on se refuse à se laisser porter par le courant, qu’on rame à contre-courant et contre le vent en plus ? Et qu’on insiste ?

    J’ai envie de recopier une petite histoire soufie, trouvée chez Jodorowsky – La sagesse des contes :

    Mulla Nasrudin se promène avec son fils. Ils aperçoivent un oeuf sur le sol. L’enfant demande :
    « Papa, comment les oiseaux rentrent-ils dans l’oeuf ? »
    Le Mulla, suffoqué répond :
    « Je me suis demandé toute ma vie comment les oiseaux sortaient de l’oeuf et, maintenant, toi, tu me poses un problème de plus ! »

    J’aime bien cette histoire.

    Bonjour Namir

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