Mardi 22 Mai 2020. Je suis en colère.

Le déconfinement se prolonge.

L’école a repris. Enfin, en théorie.

Dans les faits, les enfants resteront à la maison jusqu’en septembre.

On a lâché sur les devoirs. Ils passent quatre heures par jour devant les écrans. On a réussi à les motiver pour regarder des films d’auteurs. En contrepartie on a du céder sur « Barbie » et « Cœur océan ».

Miam.

Certains, soulagés de ne plus avoir besoin de faire la bise, ni de serrer des mains pas toujours propres, se sont habitués à cette parenthèse flottante, et redoutent désormais que la vie reprenne son cours habituel.

D’autres, comme moi, sont juste au bord de l’implosion.

Besoin d’air. De mouvement. De contact.

Tensions dans la famille et dans le couple. Violence intérieure. Colère.

Et puis il y a ceux qui financièrement se retrouvent réellement dans la merde, qui vont arrêter de payer leurs crédits, leurs assurances, leurs charges.

Et dehors, il fait beau. Il y a du soleil.

Pour certains le vernis a craqué.

Pour d’autres, ça va venir.

 

Moi je suis chanceux.

J’ai lancé deux formations d’écriture en ligne.

Je m’éclate à partager mes connaissances

et mes expériences d’écriture créative

avec des stagiaires que j’adore voir évoluer, grandir, s’ouvrir, se découvrir.

J’ai trouvé mon truc.

Mon travail est en train de prendre une jolie forme. J’ai des projets d’avenir. Et je suis confiant.

Pourtant je suis en colère.

 

Cette colère, je la ressens tous les jours.

Chaque matin, quand mon fils voit sa sœur faire un truc qu’il ne peut pas faire, il hurle.

C’est IIIINJUUUSTE !!

Je lui réponds

Joachim, ce n’est pas vrai ! Tu peux pas dire ça. On fait tout pour être justes, et pas faire de distinctions entre ta sœur et toi.

Mais non

Il a raison

C’est injuste.

Et ça le sera toujours.

Parce qu’il sera toujours le deuxième. Et sa sœur la première.

Et il a le droit d’être en colère pour ça.

C’est juste normal en fait.

D’ailleurs, sa sœur aussi est en colère.

Pour elle aussi c’est injuste d’avoir un petit frère.

Moi aussi, des fois, comme mon fils, j’aimerais hurler :

 

C’est IIIINJUUUSTE que vous me fassiez des reproches,

alors que vraiment, je fais de mon mieux  pour vous élever ! 

 

Récemment ma fille a fait une crise pendant un repas, à cause d’une histoire de jambon.

Une de ces crise que je pensais ne pas voir venir avant ses 16 ans. Elle en a 10.

 

Au lieu de l’apaiser, je lui ai dit.

 

« Vas-y , t’as raison de te mettre en colère… Je comprends que pour toi, elle paraisse injuste, ma décision… alors crie autant que tu peux, casse… tu as le droit. Ça ne changera pas ma décision, mais tu as le droit d’exprimer ce que ça te fait « 

J’ai eu peur.

Le panier à linge est parti en morceaux.
Le mur de l’entrée en garde encore des traces.

Mais elle est allée au bout de sa colère.

Intérieurement, j’étais impressionné.

Elle faisait ce qu’une part de moi ne s’autorise toujours pas à exprimer pleinement.

 

On dit toujours à nos enfants :

« Calme toi, détends toi, ça va aller »

Ben non. C’est comme si on leur disait :

 « Ferme ta gueule. T’as pas le droit de nous faire chier. Ici, c’est interdit d’être libre d’exploser. Tu n’as  pas le droit d’exister, en dehors du cadre qu’on te propose »

Forcément, ça finit par exploser.

Parce que la vie en nous est explosive.

Ma fille a donc hurlé, tapé, cassé, insulté, menacé, pleuré.

Puis, les cris ont cessé.

Elle est venue nous rejoindre à table, et nous avons continué notre repas.

Et ça recommencera.

J’étais en colère pendant des années de ne pas réussir à terminer mes scénarios, de devoir en jeter 50 versions à la poubelle parce que j’arrivais pas à me reconnaitre dedans. 

J’en ai souffert le martyr, pleuré, je me suis détesté.

J’ai haï la réussite des autres.

Elle est encore là cette colère, aujourd’hui

J’apprends à l’exprimer, comme dans cet article.

Je m’autorise même à hurler mes 5 minutes de colère quotidienne.

J‘ai le droit de vivre la colère autant que j’ai le droit de vivre l’amour

S’aimer, c’est aussi apprendre à aimer ce que parfois on réprime, pensant que cela ne doit pas être.

 

Ma colère, c’est de l’énergie disponible. Une énergie de dingue.
Elle me guide même à accompagner des gens qui se sentent frustrés, impuissants,
qui sentent qu’il y a un truc en eux qui veut s’exprimer, et qui ne sort pas.
Alors oui, ma fille me fait peur parfois,
Oui elle me met en rage avec ses crises,
Oui, j’ai parfois envie de l’étrangler
Et je l’aime.
Vos clients, vos lecteurs, votre public
attendent aussi  que vous ayez la rage.
La rage contre la souffrance.
Contre les abus.
Contre votre impuissance à changer le monde.
Ou contre les cons qui agissent comme des moutons,
et qui se croient libres.
Elle est même salutaire en fait.

Utilisez la donc cette colère pour  exprimer votre rage.
C
assez les murs de votre imagination.

L’écriture, est un des rares métiers,
ou l’on peut se défouler sans trop de risques,
tuer nos enfants,
massacrer des populations entières,
et laisser libre cours à notre pulsions,
sans se soucier de morale,
ou de chercher à être quelqu’un de bien.
 

Et c’est ça qu’est bien.

A suivre….

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